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le cas où il serait attaqué. Il laissa tomber les derniers mots dans le silence, et dit :

— Vous inventez.

— C’est facile à dire : prouvez-le !

— La preuve est également aisée. Je ne verrai pas madame Limerel, parce que je pars ce matin.

— Vous dites ?

— Je dis que je quitte Paris, ce matin, par le train de 11 heures 39.

Félicien considéra, les yeux dans les yeux, l’homme qui repoussait ainsi, d’un mot, tout soupçon de trahison. Il devina, il vit que cette jeunesse qui avait côtoyé la sienne, un moment, était d’une absolue sincérité, qu’il l’avait offensée injustement. Il devint extrêmement pâle ; une larme gonfla ses paupières ; il tendit la main.

— Pardonnez-moi… Je vous ai mal jugé. Je suis très malheureux…

Puis, ne voulant pas pleurer, sentant que les mots qu’il pensait étaient tout noyés de larmes, il se rapprocha de l’ouverture par où entrait le matin rayonnant. Réginald fit de même, et ils se turent. Le soleil mettait entre eux une barrière