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à cette heure, par la précision et la vigueur des mouvements, par l’absorption de l’esprit dans l’effort physique, l’oubli de toute coquetterie et de toute politesse vaine. Ils jouaient avec le sentiment passionné que donne un art longtemps étudié. Chez eux, l’orgueil d’un coup heureux, l’appréhension, le dépit, l’admiration jalouse, le désir de vaincre, dominaient l’instinct même de la jeunesse. Pas un mot n’était échangé. À l’ouest de la prairie, assemblé dans une allée, le long de la haie, un public assez nombreux, choisi, presque entièrement féminin, regardait. C’étaient quelques grandes dames qui avaient leur habitation aux environs, des baigneuses installées pour l’été dans les villas de la côte, de vieilles filles pauvres, errantes et dignes, comme il en abonde en Angleterre, et qui venaient de Westgate, de Birchington, de Minster, de Deal, d’autres coins encore de ce Kent réputé pour son climat tiède et pour son air excitant et léger. Toutes ces personnes avaient été présentées les unes aux autres, soit qu’elles fussent des invitées, soient qu’elles fissent partie du club de tennis de Westgate. Elles formaient un groupe fermé, lié