de l’art. Pour cela il faut attendre sans doute que le travail du temps s’accomplisse, du temps qui opérera le tri nécessaire dans son œuvre complexe et touffue, du temps où une prochaine littérature le désignera comme l’initiateur d’une vision nouvelle de nature et d’humanité. Cette place, on peut la situer déjà parmi les plus grands écrivains du dix-neuvième siècle de la lignée de Balzac et de Flaubert, aux côtés de Barbey d’Aurevilly, des Goncourt et de Zola.
De cette impartiale et inévitable justice de l’avenir je
salue l’augure dans les fêtes magnifiques qui ont, cette
année, réuni autour de Camille Lemonnier la cohorte, limitée mais enthousiaste, de ses admirateurs. En ce jubilé,
marquant la longue étape parcourue et devançant les jugements futurs, une lumière s’est faite autour de cette figure.
Lorsque Camille Lemonnier est apparu, en cette inoubliable
soirée du 8 mars, parmi les acclamations, la grandeur de
l’homme qui, sans nul appui que sa foi et son instinct,
sans hésitation et sans trêve, s’est élevé dans le désert de
son pays, du travailleur acharné, au labeur immense, aux
luttes incessantes avec la matière
dont il sortit tant de fois victorieux,
du pétrisseur d’humanité des mains
duquel tout un monde est sorti, à
cet instant lumineux se révéla dans
l’unité fascinante de son œuvre et
de sa vie.