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vancer vers vous, quelque chose du paysan. La parole très nette, aux intonations claires, s’élève par sursauts. Et l’ensemble exprime de la rudesse et de la douceur.

Dans cette vie de poète, pas une parcelle mangée par la convention : tout est demeuré libre et selon la vie. Il n’y a pas eu place non plus pour les compromissions et les calculs. Jamais il n’a su faire le simple geste qui, pour une minute de volontaire transigeance, eut pu lui dispenser des avantages idéals ou matériels, À ce point de vue, il semble à peine de notre monde où, dans, l’universelle concurrence, sombrent si facilement la dignité et la probité d’un artiste. Il a maintenu son indépendance avec une invraisemblable ténacité.

Existerait-il quelque relation entre cette intransigeance et la situation littéraire de Verhaeren, qui n’est pas sans présenter certaines singularités ? Elle s’offre, en effet, sous un double aspect selon qu’on envisage le poète, comme reconnu, ou méconnu.

À l’étranger, sa position est claire. En ces dernières années, toutes les revues les plus significatives, tous les organes de l’opinion artiste et avancée en Europe l’établissent et la proclament. On le traduit, on le discute, on lui rend hommage. En Angleterre, Arthur Symons a propagé son nom en de nombreux articles et traduit les Aubes. Alma Strettel a publié un choix de poèmes et Osman Edwards prépare une version du Cloître. Il y a