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pitantes, sillonnées d’éclairs illuminant les contrées nouvelles sur lesquelles le poète a planté le drapeau de l’art. Deux d’entre elles surtout m’apparaissent d’une telle splendeur conjecturale et prophétique que je voudrais les mettre à part : le poème des Usines et le morceau final du livre. Les Usines, c’est un hymne où, pour la première fois sur notre coin de terre, la beauté de l’ère industrielle et démocratique est triomphalement célébrée. Un artiste s’est offert qui, ayant assimilé son temps, en a crié le miracle. Oh ! les chevaliers de légendes, oh ! les princesses et les cygnes ! Comme vous apparaissez fantomatiques et nuls, lorsqu’un poète enfin soulève de ses poings brandis ces quartiers de beauté vivante ! Et qui ne reconnaîtrait l’immortalité dont tressaille ce morceau magnifique, Vers le Futur, où l’approche du monde nouveau est annoncé dans un transport pareil à celui du fidèle qui sent venir son dieu ? Une indicible sensation cosmique gonfle ces vers, qui seront classiques un jour :

Ô race humaine aux astres d’or nouée,

As-tu senti de quel travail formidable et battant,
Soudainement, depuis cent ans,

Ta force immense est secouée ?


Cet hymne ne pourrait-il devenir le cantique d’une humanité ?

Si les Villes Tentaculaires reflètent avant tout Londres, la tant parcourue et la tant aimée, elles évoquent aussi bien, par tout l’universel qu’elles