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des strophes du poète. Mais à ce point de vue, aucun poème du recueil n’est aussi gonflé de significations que celui des Cordiers, qui, malgré, l’œuvre postérieure, demeurera l’une des plus pures merveilles qu’ait réalisées le visionnaire des campagnes flamandes.

Je suis celle des surprises fécondes

Qui vous conseille avec amour, d’aller
Vous-même enfin vous retrouver,

Là-bas, dans votre fuite au bout du monde.


Dans la vie et par conséquent dans l’œuvre de Verhaeren, les voyages, les libres balades à travers le monde, ont joué un grand rôle. Le goût est inné chez lui du changement et de l’aventure, il en a besoin pour satisfaire ses curiosités et ses nostalgies. Nous l’avons vu passant la Manche, à chaque désir qui le poignait de se griser de l’atmosphère de Londres. Un peu plus tard il avait couru l’Allemagne, du nord au sud, et poussé jusqu’à l’Espagne, comme ses compatriotes Claus et Meunier. Il faudrait, dans une étude moins brève que celle-ci, évoquer la silhouette de Verhaeren parcourant les villes, en pèlerin du rêve, musant au pied des statues et des cathédrales, le long des ports où s’érigent les mâtures, où flottent des relents de goudron et de poisson, où vous requiert l’invite grisante des coques puissamment armées pour le combat des flots, sur les quais d’une gare trépidante ou le long de trottoirs populeux, perdu dans l’océan des toujours nouveaux visages —