laient de leurs navires en route sur les mers lointaines, l’enfant les écoutait, immobile et fiévreux, et à travers sa songerie puérile s’exacerbaient des soifs de départ et d’aventure en des terres merveilleuses et indicibles.
Pour l’instant les seules aventures — et combien attrayantes déjà ! — c’était lorsqu’on partait
en bande, entre cousins ou camarades, pour des expéditions en dehors du bourg, loin, très loin, vers les confins du monde…
Dès qu’on avait dépassé les dernières maisons, on ôtait ses souliers et
on courait pieds nus, comme des fous, vers les prés
bordant l’Escaut, ou bien en maraude par les vergers pour s’emplir les poches de pommes conquises
et pillées, bien plus savoureuses que celles qu’on
entassait au logis dans la chambre aux fruits. Ah !
cette enfance de gamin de village, les folles équipées dont on se souvient toujours ! L’été c’était
les baignades joyeuses en une crique de l’Escaut,
sous le grand soleil, l’hiver le patinage.
On ne songeait à rien, sinon au flux de joie
Qui saisissait nos corps, comme des proies,
Et les marquait, superbement,
Le fils des bourgeois de Saint-Amand était l’ami des gens du village, entrait chez le maréchal ou le cordier, indispensables personnages, interrogeait le passeur d’eau, vivait en contact avec les hommes des petits métiers, dont il se souvint plus tard pour