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doivent autoriser l’opinion commune, parce qu’elles ne sont pas sur des choses qui soient du ressort de l’historien. S’il s’agissait d’un Conseil d’État, d’une Negociation de paix, d’une bataille, d’un siège de ville, etc., le témoignage de l’Histoire pourrait étre décisif, parce qu’il se peut faire que les Historiens aient fouillé dans les Archives et dans les instructions les plus secrètes et puisé dans les plus pures sources de la vérité des faits. Mais s’agissant de l’influence des Astres, et des ressorts invisibles de la nature, Messieurs les Historiens n’ont plus aucun caractère autorisant et ne doivent être plus regardés que comme un simple particulier qui hasarde sa conjecture, de laquelle il faut faire cas selon le degré de connaissance que son Auteur s’est acquis dans la Physique. Or, sur ce pied-là, Monsieur, avouez moi que le témoignage des Historiens se réduit à bien peu de chose, parce qu’ordinairement ils sont fort méchants Physiciens.

VII De l’autorité de la Tradition.

Après ce que je viens de dire, il serait superflu de réfuter en particulier le préjugé de la Tradition, car il est visible que si la prévention où l’on est de temps immémorial, sur le chapitre des Comètes, peut avoir quelque fondement légitime, il consiste tout entier dans le témoignage que les Histoires et les autres livres ont rendu sur cela dans tous les siècles : de sorte que si ce témoignage ne doit être d’aucune considération, comme je l’ai justifié et comme il paraîtra encore davantage par ce qui me reste à dire, il ne faut plus faire aucun compte de la multitude des suffrages qui sont fondés là-dessus.