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ALEXANDER AB ALEXANDRO.

Cependant, si nous en croyons M. Moréri, tous les grands hommes de ce siècle-là, un George de Trébizonde, un Théodore de Gaze, un Domitius Calderinus, un Hermolaüs Barbarus, un Philelphe, un Pontanus, etc. étaient ses amis et ses admirateurs. Tout ce que l’on peut recueillir du livre même d’Alexander ab Alexandro, est qu’il ouït en sa jeunesse les leçons que Philelphe, déja vieux, faisait à Rome[1], et qu’il mangeait quelquefois avec plusieurs personnes de lettres chez Jovianus Pontanus [2], chez Hermolaüs Barbarus[3], chez Sannazar[4], chez Gabriel Altilius [5], etc. Il faut un fondement plus solide que celui-ci, pour affirmer que certaines gens admirent certaines gens. Voyez la remarque suivante.

(E) Il était à Rome lorsque Nicolas Pérot et Domitius Calderinus y faisaient des leçons publiques sur Martial. ] Voilà tout ce que l’on peut recueillir de ce qu’il rapporte touchant Nicolas Pérot et Domitius Calderinus ; car pour cette grande familiarité, que Panzirole prétend qu’il eut avec eux[6], il la faut chercher quelque autre part : et je ne sais s’il est possible d’en trouver les preuves. Je ne ponte point que Panzirole n’ait dit cela à vue de pays, et sur la foi de sa mémoire, sans prendre garde que la mémoire est un moule où les objets changent de forme très-aisément.

(F) L’exactitude de son ouvrage n’est point dans sa perfection. ] J’aime mieux le dire par le témoignage de l’un des commentateurs, que de mon chef. Voici donc ce que dit Nicolas Mercerus : Est profectò, mi Linoceri [7], verum quod aïunt. Fuit Alexander vir eruditus et multæ lectionis : multa ad utilitatem publicam scripsit eleganter, multa tamen, ut hominum est infirmitas, minùs accuratè vel memoriæ vitio, vel imprudentiâ lapsus. Quæ lectoribus indicari magni interfuit. Je ne suis pas le seul qui trouve mauvais que ceux qui nous donnent des variorum, retranchent les Épîtres dédicatoires et les Préfaces [8]. Ils devraient tous faire ce qu’on a fait dans la dernière édition de Diogène Laërce[9]. Si on l’avait fait dans celle d’Alexander ab Alexandro, j’aurais pu donner plus de lumière sur cet auteur et sur son livre.

(G) L’auteur de la Bibliothéque Napolitaine n’a nullement réussi dans l’article de notre Alexander. ] Il s’est contenté de renvoyer ses lecteurs à trois ou quatre autres livres[10] ; et il n’a point su qu’Alexander, jurisconsultus Neapolitanus, auteur des quatre Dissertations desquelles il donne le titre[11], n’est point différent d’Alexander ab Alexandro : de sorte qu’il parle deux fois du même homme, sans savoir que ce ne sont pas deux écrivains. Voici le titre des quatre Dissertations : Alexandri, jurisconsulti Neapolitani, Dissertationes quatuor de rebus admirandis quæ in Italiâ nuper contigêre : id est, de Somniis quæ à viris spectatæ fidei prodita sunt, inibique de Laudibus Juniani Maii Somniorum conjectoris : de Umbrarum figuris et falsis Imaginibus : de Illusionibus malorum dæmonum, qui diversis imaginibus homines delusêre ; de quibusdam Ædibus, quæ Romæ infames sunt, ob frequentissimos lemures, el terrificas imagines, quas author ipse singulis ferè noctibus in urbe expertus est : Romæ, in-., absque anno, nec apud quem. On n’a marqué, ni le nom de l’imprimeur, ni l’année de l’impression. Nous verrons dans la remarque suivante, que ce sont des pièces qui ont été incorporées au volume des Jours Géniaux.

(H) Les additions de Léonard Nicodème, sont très-curieuses sur son sujet. ] On y prouve qu’Alexander ab Alexandro est l’auteur des quatre Dissertations, parce que la plupart des choses qu’elles contiennent se lisent dans les Jours Géniaux : par exemple, ce qui concerne les louanges de Junianus Majus, et les présages des son-

  1. Alex. ab Alex., lib. I, cap. XXIII.
  2. Id. ibid., lib. I, cap. I. Voyez aussi liv. III, chap. VIII.
  3. Ibid., lib. III, cap. I.
  4. Ibid., lib. II, cap. I.
  5. Ibid., lib. V, cap. I.
  6. Admodùm familiaris fuit. Panzirol. de Claris Leg. Interpr., lib. II, cap. CXXII.
  7. C’est celui à qui il dédie ses Notes.
  8. Voyez M. Crenius, au chapitre Ier. de la Ire. partie des Animadversiones Philologicæ et Historicæ, et la remarque (R) de l’article Marot, à la fin.
  9. Celle d’Amsterdam, en 1692 : on y trouve la plupart des Préfaces, etc., des éditions précédentes.
  10. Nicolo Toppi, Biblioth. Napolet., p. 6.
  11. Là même, pag. 7.