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ALÉANDRE.

parle de Maphée Barberin, ou d’Urbain VIII. Voici l’une des épigrammes qu’il a faites à la louange d’Aldrovandus :

Multiplices rerum formas, quas pontus et æther
Exhibet, et quidquid promit et abdit humus,
Mens haurit, spectant oculi, dùm cuncta sagaci,
Aldobrande, tuus digerit arte liber ;
Miratur proprios solers industria fœtus,
Quamque tulit moli se negat esse parem :
Obstupet ipsa simul rerum fecunda creatrix,
Et cupit esse suum quod videt artis opus[1].


Lorenzo Crasso en rapporte une autre avec celle-là.

  1. Lorenzo Crasso, Elogii d’Huom. Letterati, tom. I, pag. 137, 138.

ALÉANDRE (Jérôme), archevêque de Brindes, et cardinal au XVIe. siecle[* 1]. Alexandre VI souhaita de l’avoir à son service (A), et le voulut donner pour secrétaire à son fils. Il changea peu après de résolution, et aima mieux l’envoyer négocier en Hongrie ; mais Aléandre se trouva malade en ce temps-là, et ne put partir de Venise où il demeurait. Louis XII le fit venir en France l’an 1508 (B), pour la profession des belles-lettres dans l’université de Paris[* 2]. Aléandre était alors âgé de vingt-huit ans. Il se fit fort estimer dans cette charge. Il passa au service d’Éverard de la Mark, évêque de Liége, qui l’envoya à Rome pour faciliter sa promotion au cardinalat, contre les oppositions de la France. Léon X le trouva assez habile pour souhaiter de le retenir, à quoi l’évêque de Liége donna les mains. Aléandre fut d’abord placé chez le cardinal de Médicis[a], auquel il servit de secrétaire : il eut ensuite la charge de bibliothécaire du Vatican[* 3], après la mort d’Acciaioli. Mais le grand théâtre où il commença de paraître avec éclat fut l’Allemagne, au commencement des troubles que la réformation y excita. Il y fut envoyé nonce du pape, l’an 1519[* 4]. Il y fit le personnage d’ambassadeur et le personnage de docteur, selon les rencontres. Il parla trois heures de suite devant la diète de Worms, contre la doctrine de Luther[b] ; mais on prétend qu’il ne la rapporta point fidèlement[c]. Il ne put point empêcher que Luther ne fût ouï dans cette diète, et il refusa de disputer avec lui ; mais il obtint que l’on brûlerait ses livres, et qu’on proscrirait sa personne : il dressa même l’édit qui le proscrivait[d]. Il était nonce auprès de François Ier., devant Pavie, l’an 1525, et il tomba entre les mains de quelques soldats qui le maltraitèrent (C). Il fut envoyé une seconde fois en Allemagne, l’an 1531, et trouva un changement considérable, s’il en faut croire ce qu’on dit qu’il écrivit. Le peuple, dans les villes protestantes, n’était plus si animé contre le pape ; mais dans les villes catholiques, il témoignait une envie extrême de secouer le joug de

  1. * Leclerc le dit né à La Motte, le 13 février 1480. Bayle l’avait dit dans sa note B.
  2. * Joly, d’après Chevillier, lui fait, avec Tissard, l’honneur d’avoir établi l’imprimerie grecque à Paris.
  3. * C’est à tort, dit Joly, que Ciaconnius rapporte qu’Aléandre conserva cette place après être parvenu au cardinalat.
  4. * Ce fut en 1520, dit Leclerc ; et il y porta la bulle de Léon X contre Luther, qui est de juillet 1520.
  1. Qui fut le pape Clément VII.
  2. Ex Pallavicini Hist. Conc. Trid. Ce fut l’an 1521.
  3. Seckendorf, Historia Lutheranismi, lib. I, pag. 149.
  4. Pallavic. Hist. Conc Trid., lib. I, cap. XXVIII, num. 3.