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ALCYONIUS.

niæ dolore miserè consternatus, Hispani hostis libros in tabernis, ut concremaret, gravi pretio coëmere cogeretur [1]. Voyez, les Épîtres des Princes recueillies par Ruscelli, et traduites par Belleforêt, folio 93. Voyez aussi la XXVIIe. et la dernière lettre du IIIe. livre de Longolius. Si benè te novi, ipse tu denunciabis ; c’est-à-dire, que l’ouvrage de Sépulvéda était imprimé, ut hominis ad tantæ contumeliæ nuncium, vultum videus : quod unun sanè spectaculum tibi magnoperè invideo. Nunquàm enim is ex oculis laboravit, qui tùm ejus frontem spectârit[2].

(C) On l’accusa.…. d’avoir été un impudent parasite. ] Rapportons les termes de Paul Jove : Cùm nullâ ex parte ingenuis, sed planè plebeis et sordidis moribus fœdaretur, erat enim impudens gulæ mancipium, ità ut eodem sæpè die bis et ter alienâ tamen quadrâ cœnitaret ; nec in eâ fœditate malus omninò medicus, quòd domi demùm in lecti limine per vomitum ipso crapulæ onere levaretur[3]. M. Varillas ne parle que de l’ivrognerie d’Alcyonius ; il ne l’accuse que de s’être enivré toutes les fois qu’il en trouvait l’occasion. Latomus, dont Paul Jove rapporte les vers, fait mention des deux excès de ce personnage, de celui de boire et de celui de manger.

(D) Paul Jove le crut son rival dans la commission d’écrire l’histoire. ] Celui qui nous apprend cela ajoute qu’il n’était point vrai qu’Alcyonius dût composer une histoire, et qu’on ne l’avait dit à Paul Jove qu’afin de les brouiller ensemble[4]. Le cardinal de Médicis se divertissait à ces querelles des savans : il se faisait un plaisir des inquiétudes où il jetait Alcyonius en protégeant Sépulvéda[5]. Notez qu’Alcyonius loua magnifiquement la première Décade de l’Histoire de Paul Jove, dans la IIe. partie de son Traité de Exilio.

(E) On l’accusa de s’être approprié plusieurs morceaux d’un traité de Cicéron, de Gloriâ, et ensuite de l’avoir jeté au feu. ] Paul Jove n’est pas le seul[* 1] qui raconte cette supercherie funeste. Paul Manuce, dans son Commentaire sur ces paroles de Cicéron : Librum tibi celeriter mittam de Gloriâ[6], en parle ainsi : Libros duos significat, quos de Gloriâ scripsit : qui usque ad patrum nostrorum ætatem pervenerunt. Nam Bernardus Justinianus, in indice librorum suorum nominat Ciceronem de Gloriâ. Is liber posteà cùm universam Bibliothecam Bernardus monacharum monasterio legâsset, magnâ conquisitus curâ, neutiquàm est inventus. Nemini dubium fuit quin Petrus Alcyonius, cui monachæ medico suo ejus tractandæ Bibliothecæ potestatem fecerant, homo improbus furto averterit. Et sanè in ejus Opusculo de Exsilio aspersa nonnulla deprehenduntur, quæ non olere Alcyonium auctorem ; sed aliquantò præstantiorem artificem videantur. Nous apprenons de ce passage qu’Alcyonius était médecin de profession. Voyez la remarque (I). Or, puisqu’il l’a été d’un couvent de religieuses, il ne saurait être vrai, ce me semble, qu’il ait passé toute sa vie dans l’imprimerie de Manuce. C’est une nouvelle preuve de l’erreur de Varillas.

J’ai deux choses à remarquer contre cet historien. La première est que, dans le Fragment de son Louis XI, il imputait à Philelphe le plagiat et la destruction du Traité de Gloriâ, et citait les petits Éloges de Paul Jove. On l’avertit[7] que cela n’y était point. Il a profité sans doute de cet avis en publiant son Louis XI ; car, après avoir observé, touchant Philelphe, les mêmes choses que dans le Fragment, il ajoute : Il n’est pourtant pas certain qu’il ait été coupable de ce crime, qui passe pour un des plus grands qui se commettent en matière de littérature ; et il y a des auteurs qui l’imputent à un savant du même temps, nomme Alcyonius, et soutiennent qu’il s’appropria ce livre de Cicéron après en avoir changé le titre, qui était de la Gloire, en celui de l’Exil[8]. Il applique à ce

  1. * Outre les auteurs cités par Bayle, Joly en nomme cinq autres qui ont aussi accusé Alcyonius de s’être approprié le traité de Gloriâ.
  1. Paul. Jovius, Elogior. cap. CXXIII, pag. 265.
  2. Longolius, Epist. ultim. libri III, fol. 256, verso.
  3. Paul. Jovius, Elogior. cap. CXXIII, pag. 265.
  4. Lettres des Princes, folio 93.
  5. La même.
  6. Cicero, Episto a ad Atticum XXVI libri XV.
  7. Dans les Nouvelles de la République des Lettres, juin 1685, article I, vers la fin.
  8. Varillas, Hist. de Louis XI, liv. I, pag. 39, édition de Hollande.