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ALCIAT.

fulguris exspectabam, ut quasi hæreticus aut profanus in Conciliis traherer aut Synagogis.…. Sæpè autem (Deus scit) in tantam lapsus sum desperationem, ut Christianorum finibus excessis ad Gentes transire disponerem, atque ibi quietè sub quâcumque tributi pactione inter inimicos Christi christianè vivere[1]. Or, comme Alciat avait encore plus à craindre du papisme qu’Abélard, et qu’il ne voyait guère de sûreté dans les pays où les autres chrétiens étaient les maîtres,

Tenent Danai quà deficit ignis[2],


ses boutades et ses caprices auraient bien pu lui faire naître l’envie d’essayer la tolérance des Turcs, et l’en dégoûter bientôt pour l’envoyer à Dantzick. Apprenons à nous défier de certains récits, encore que des auteurs considérables les adoptent.

(F) Calvin et Bèze ont parlé de lui comme d’un fou à lier. ] Le premier dit que le jour que l’on proposa aux Italiens soupçonnés d’hétérodoxie un formulaire à signer, Alciat s’emporta dire manière furieuse : Inter quos princeps fuit Joannes quidam Paulus Alciatus, homo non stolidi tantùm ac vesani ingenii, sed planè phreneticus ad rabiem usque[3] : l’autre dit que c’était un homme à vertiges et un frénétique ; Paulus quidam Alciatus, Mediolanensis, homo jam anteà plané phreneticus et vertiginosus[4].

  1. Abælardi Oper., pag. 32.
  2. Virgil. Æneid., lib. II, vs. 505.
  3. Calvin. advers. Valent. Gentil, p. 659. Tractat. Theolog.
  4. Beza, Epistol. LXXXI.

ALCIAT (Térence), jésuite italien, issu de la même famille qu’Alciat le jurisconsulte, naquit à Rome, l’an 1570. Il étudia cinq ans en droit avant que de se faire jésuite. Ce fut au mois de mars 1591 qu’il entra dans cette société. Les emplois qu’il y a eus témoignent qu’on l’y regardait comme un sujet important. Il fut pendant treize ans préfet du collége de Rome ; il y enseigna cinq ans la philosophie, et dix-sept ans la théologie. Après cela, il fut directeur de la pénitence du Vatican, et sous-supérieur de la maison professe. Il assista à la neuvième congrégation générale des jésuites, comme député de la province de Rome ; et lorsqu’il mourut d’apoplexie, le 12 de novembre 1651, il était sous-provincial. Il n’était pas dans une moindre considération hors de la société ; car outre qu’il fut longtemps qualificateur de la congrégation du Saint Office, et consulteur de la congrégation des rites, il fut choisi par le pape Urbain VIII, pour réfuter le père Paul. Il préparait une édition des actes du concile de Trente, qui aurait été l’apologie de cette assemblée contre toutes sortes d’adversaires, et nommément contre ce redoutable Vénitien. Il avait déjà ramassé un grand nombre de matériaux pour cet important et pénible ouvrage, lorsque la mort le fit sortir de ce monde[a] ; mais encore qu’il eût donné plusieurs années à ce travail, il n’avait presque pas commencé la forme de son ouvrage. Le père Sforce Palavicin, qui fut chargé du même dessein, nous apprend pourquoi le père Alciat était demeuré si loin de l’exécution (A). Si M. Moréri avait seulement jeté les yeux sur la préface du cardinal Palavicin, il n’aurait pas mis entre les œuvres du père Alciat les Actes du concile de Trente. Il n’y faut mettre qu’un Sermon sur la Passion, prononcé devant le pape Clément VIII, en 1602, et la Vie de Pierre Fabri, compagnon

  1. Ex Bibliothecâ Scriptorum Societatis Jesu, Nathanaëlis Sutuelli.