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ALCIAT.

cin, et sur Averroës et Wimpina, qui l’appellent subtil philosophe. On peut juger de son esprit et de son érudition par les deux livres imprimés que l’on a de lui : de Temporum Mutationibus, et de Gradibus medicinarum compositarum investigandis. On en trouve beaucoup d’autres cités fort souvent par les auteurs sous les titres de Ratione sex Quantitatum ; de Quinque Essentiis ; de Motu diurno ; de Vegetabilibus, et de Theoricâ Magicarum Artium. Ce dernier ouvrage a donné sujet à tous les démonographes de parler d’Alchindus comme d’un pernicieux magicien. François Pic et Conrad Wimpina ont discouru amplement des hérésies, des blasphèmes et des absurdités qu’on remarque dans ce livre. Le fameux Jean Pic ne paraît pas en avoir jugé si désavantageusement, puisqu’il a dit qu’il n’avait reconnu que trois hommes qui eussent effleuré la magie naturelle et permise : savoir, Alchindus, Roger Baccon, et Guillaume, évêque de Paris. Ce qu’il y a de plus certain au dire de Gabriel Naudé, dont j’emprunte cet article, est, 1° que cet ouvrage est rempli de superstitions et de doctrines tout-à-fait contraires à notre foi, et telles qu’on le doit attendre d’un mahométan qui écrit fort librement ce qu’il pense ; 2°. qu’il n’y aurait nulle apparence de l’accuser de magie, puisque, bien loin de s’amuser à la magie théurgique ou goétique, son dessein n’a été autre que de rapporter à la nature tout ce que l’on attribue aux anges bons ou mauvais ; c’est ce qu’ont fait depuis lui Pierre d’Apono et Pomponace [a]. Ces gens-là, pour trouver leur compte, supposent que les choses sublunaires dépendent entièrement des cieux ; qu’elles reçoivent toutes leurs propriétés les unes des autres, et que chacune les reçoit du total par le moyen de certains rayons corporels qui, passant des plus petites jusqu’aux plus grandes, sont la cause, à ce qu’ils disent, de tout ce qui se fait dans la nature. Nous ne savons pas au vrai quand Alchindus a vécu ; mais on ne peut pas le mettre au-dessous du XIIe. siècle, puisque Averroës fait mention de lui. Il y a un Jacobus Alkindus que quelques-uns confondent avec celui dont je parle (A).

  1. Naudé, là même, et pag. suivantes.

(A) Quelques-uns confondent un Jacobus Alkindus avec celui dont je parle. ] Wolfgang Justus fait vivre ce Jacobus Alkindus sous le pape Eugène troisième, en 1145, contemporain d’Averroës et d’Avicenne : il dit que c’était un médecin et un philosophe arabe[1]. Les bibliographes attribuent les mêmes livres à Alchindus, et à Jacobus Alkindus. Vossius semble les distinguer ; car, quand il parle d’Alchindus, il ne lui donne que le Traité de sex Quantitatibus, et ne marque point son âge : mais il met Jacobus Alkindus en 1235, et il lui donne entre autres livres un Traité de Radiis Stellarum[2]. C’est sans doute le même livre que Gesner allègue sous le titre de Radiis Stellicis, et qu’il croit être de Jacques Alkindus, quoique le nom de Jacques n’y soit pas joint à celui d’Alkindus. On jugerait par le titre seul qu’il appartient à celui qui a été suspect de magie.

  1. Apud Mercklinum, in Lindenio renovato.
  2. Vossius, de Scient. Mathemat., pag. 61 et 179.

ALCIAT (André), grand jurisconsulte, a fleuri au XVIe. siè-