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AKAKIA.

lui ; de sorte que, pour ne pas succomber à tant de peines, il se démit de sa chaire de professeur, sous le bon plaisir du roi, entre les mains de Jean Martin, homme très-capable de cette charge, comme ses écrits le témoignent (B). Mais ce Jean Martin, ayant bien considéré qu’elle serait incompatible avec ses autres affaires s’il la voulait remplir en conscience, la rendit à Martin Akakia. Celui-ci disposa tout aussitôt de cet emploi en faveur de Pierre Seguin, son beau-fils, et mourut fort peu après, l’an 1588, à l’âge d’environ quarante-neuf ans. Il laissa deux fils dont je vais parler, et une fille qui fut mariée à Pierre Seguin, l’un des plus doctes médecins de la faculté de Paris, et qui exerça la profession de son beau-père dans le collége Royal, depuis l’an 1588, jusques en 1599. Le traité de Morbis muliebribus, et les Consilia Medica de notre Martin, ne sont presque connus de personne que sous la fausse supposition qu’ils viennent de la même main que les traités de Martin Akakia de Châlons. Je n’ai point vu de bibliographe qui distingue les écrits du père d’avec les écrits du fils : on attribue les uns et les autres à Martin Akakia Catalaunensi. J’y aurais été trompé, aussi-bien que M. Moréri, si je n’eusse recouru aux lumières de quelques amis (C). Les deux livres de Morbis muliebribus ont été insérés dans le recueil qu’un médecin nommé Israël Spachius fit imprimer à Strasbourg, en 1597, de divers traités touchant les maladies du sexe ; et pour les Consilia medica, on les trouve dans le recueil de pareils ouvrages, que Scholzius fit imprimer à Francfort, en 1598. Il y a beaucoup d’apparence qu’Israël Spachius a cru que les deux livres de Morbis muliebribus étaient un ouvrage du disciple de Brissot. C’est lui sans doute qui mit au titre, Martini Akakiæ, Medici Regii, et in un universitate Parisiensi professoris medicinæ doctissimi, etc. L’ouvrage n’avait jamais été imprimé ; il courait en manuscrit. Spachius savait en général que Martin Akakia l’avait fait, et il crut bonnement que cet Akakia était le même dont le public avait déjà vu des livres ; ainsi, il lui donna les qualités de l’Akakia de Châlons, et non pas celle de professeur royal, que l’auteur se serait donnée, s’il avait publié lui-même son livre.

(A) Tristan de Rostaing et Amiot furent ses patrons. ] On n’en saurait donner une preuve plus convenable que les paroles que je vais citer d’un panégyrique de Henri III ; Vix dùm (c’est Martin Akakia qui parle) igitur in publicâ professione, quâ nos Carolus rex christianissimus, Tristando Rostagnio equite torquato fortissimo, et Jacobo Amyoto Altissiodorensium episcopo de nobis referentibus, cohonestaverat, quadriennium compleveramus, cùm tu nos inter tuos medicos allegisti et conscripsisti. Ce panégyrique fut imprimé à Paris, l’an 1578 ; en voici le titre : Martini Akakiæ, regii et medici et professoris, ob suam in ordinem regiorum medicorum cooptationem, panegyricus, Henrico Valesio regi christianissimo dictus.

(B) Les écrits de Jean Martin témoignent sa capacité. ] René Moreau a eu soin de faire imprimer deux ouvrages de cet auteur : Prælectiones in librum Hippocratis Coi de Morbis internis, à Paris, en 1637 ; Prælectiones in librum hippocratis Coi de Aëre, Aquis, et Locis, à Paris, en 1646. Il a mis l’éloge de l’auteur à la