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AGÉSIPOLIS.

AGÉSIPOLIS, premier du nom, roi de Lacédémone, succéda à Pausanias son père, qui s’était réfugié dans un temple[a] dès qu’il avait su qu’on désapprouvait la conduite qu’il avait tenue en concluant une paix avec les Thébains. On le laissa dans cet asile, et l’on éleva sur le trône Agésipolis, sous la tutelle d’Aristodémus [b]. Ce fut la 3e. année de la 96e. olympiade[c]. Il était majeur lorsque les Lacédémoniens résolurent d’attaquer tout à la fois les Athéniens et les Thébains ; mais, comme ils jugèrent qu’il ne serait pas de la prudence, pendant une telle guerre, de n’être pas assurés des Argiens, ce fut par ceux-ci qu’ils commencèrent[d]. Agésipolis, chargé de les attaquer, se fit un scrupule sur ce qu’ils lui demandèrent une trêve. Il voulut donc s’éclaircir avec Jupiter sur un tel cas de conscience, et il le consulta en personne dans le fameux temple d’Olympe. Il lui demanda si l’on pouvait rejeter les propositions de trêve que les Argiens faisaient, et si l’on ne pouvait pas prétendre qu’ils prenaient très-mal leur temps, vu qu’ils avaient attendu à parler de paix que les troupes de Lacédémone fussent à la veille de les attaquer. L’oracle répondit que les demandes des Argiens étaient injustes, et qu’on pouvait les refuser saintement[e]. Agésipolis, pour mieux prendre ses précautions, courut aussitôt à Delphes, afin de savoir si le sentiment du fils[f] serait conforme à celui du père[g] (A). La réponse d’Apollon fut toute semblable à celle de Jupiter ; et alors Agésipolis ne balança plus, et fit marcher son armée du côté d’Argos. Les Argiens lui envoyèrent deux hérauts pour lui demander la paix : il leur répondit que les dieux avaient trouvé bon qu’il n’acceptât point ces offres, et continua sa marche. Il y eut un tremblement de terre le premier jour qu’il campa dans leurs états ; et comme une partie des troupes jugea que c’était un signe qu’il fallait s’en retourner, il dissipa leur superstition par la remarque que ce prodige était arrivé après leur entrée dans le pays ennemi. Il marcha donc plus avant, s’approcha de la ville d’Argos, et la serra de bien près. Il l’eût peut-être subjuguée si la foudre, qui lui tua quelques soldats, et si quelque autre mauvais présage ne l’eût obligé à se retirer [h]. N’oublions pas son émulation : dès qu’il fut entré au pays des Argiens, il s’informa jusqu’où Agésilaüs l’avait ravagé quelque temps auparavant ; et il n’eut cette curiosité que pour renchérir sur les exploits de ce prince, qu’il tâchait de surpasser, comme s’il avait été un athlète apparié avec lui[i]. La paix gé-

  1. Dans celui de Minerve, à Tégée. Pausanias, lib. III, pag. 86.
  2. Id. ibid.
  3. Diodor. Siculus, lib. XIV, cap. XC.
  4. Xenophon, de Reb. Græc., lib. IV, pag. 312.
  5. Ὁ δὲ θεὸς ἐπεσήμαινεν αὑτῷ ὅσιον εἶναι μὴ δεχμένῳ σπονδὰς ἀδίκως ὑποϕερομένας. Cui Deus respondit fas ei esse inducias non ritè oblatas respuere. Xenoph. de Reb. Græc., lib. IV, pag. 312
  6. C’est-à-dire, d’Apollon.
  7. C’est-à-dire, de Jupiter.
  8. Xenophon, de Reb. Græc., lib. IV, pag. 312.
  9. Ὥστερ πένταθλος πάντη ἐπὶ τὸ πλέον ὑπερϐάλλειν ἐπειρᾶτο. Tanquam enim pentathlos omninò illum superare contendebat. Xenophon, ibid.