bitarem ; quod quidem in magnum malum meum poterat recidere, tantum est in eo regno periculum de talibus loqui [1]. Nous pouvons voir là en passant, que les Espagnols et les Portugais n’ont rien oublié de tout ce que la politique la plus fine et la plus sévère peut inventer pour maintenir un parti. Ils ont employé tout cela pour le soutien du christianisme, et pour la ruine du judaïsme, et l’on aurait grand tort de les accuser d’avoir mis l’Église sous la protection céleste, avec les dispositions de ceux qui attendent tout tranquillement de l’efficace de leurs prières. On dirait plutôt qu’ils ont suivi les avis qu’un poëte païen a donnés sur une affaire d’agriculture :
Non tamen ulla magis præsem fortuna laborum est,
Quàm si quis ferro potuit rescindere summum
Ulceris os. Alitur vitium, vivitque tegendo :
Dùm medicas adhibere manus ad vulnera pastor
Abnegat, et meliora Deos sedet omina poscens[2].
Ou bien on dirait qu’ils se sont réglés
sur les reproches que Caton fit aux
Romains, lorsqu’il les blâma de se
confier en l’assistance des Dieux, qui
n’exaucent jamais les fainéans, ajoutait-il ;
car la paresse est une marque
de l’irritation du ciel. Vos..... inertiâ
et mollitiâ animi alius alium exspectantes
cunctamini, videlicet diis immortalibus
confisi, qui hanc rempubl.
in maximis sœpè periculis servavêre.
Non votis, neque suppliciis muliebribus
auxilia deorum parantur : vigilando,
agendo, benè consulendo, prosperè
omnia cedunt. Ubi socordiæ tete atque
ignaviæ tradideris, nequicquam deos
implores : irati infestique sunt[3]. Enfin
on dirait que la leçon pour laquelle
ils ont le plus de docilité, est la dernière
partie de l’axiome qu’un auteur
moderne a rapporté de cette façon. Il
faut pour ainsi dire s’abandonner à la
providence de Dieu, comme si toute
la prudence humaine était inutile ; et
il faut se gouverner par les règles de
la prudence humaine, comme s’il n’y
avait point de providence[4]. Ils se moqueraient
sans doute de tout auteur qui
les blâmerait de traiter le christianisme
comme un vieux palais qui a besoin
d’étançons de toutes parts, tant
il menace de ruine ; et le judaïsme
comme une forteresse, qu’il faut canonner et
bombarder incessamment,
si on le veut affaiblir. On peut justement
condamner certaines manières
de maintenir la bonne cause ; mais
enfin elle a besoin d’aide, et la défiance
est la mère de la sûreté. Voyez la
remarque (B) de l’article Drabicius, et
la remarque (E) de l’article Lubienietski.
(C) A des rabbins qui étaient sans juridiction. ] Il y a sans doute une grande différence entre les tribunaux que notre Acosta avait à craindre dans son pays et le tribunal de la synagogue d’Amsterdam. Celui-ci ne peut infliger que des peines canoniques ; mais l’inquisition des chrétiens peut faire mourir, car elle livre au bras séculier ceux qu’elle condamne. Je ne m’étonne donc pas qu’Acosta ait eu moins de peur pour l’inquisition des juifs que pour celle de Portugal : il savait que la synagogue n’avait point de tribunaux qui se mêlassent des procès civils ni des procès criminels ; et ainsi il regardait ses excommunications comme un brutum fulmen : il ne découvrait à la suite de cette peine canonique ni la mort ou quelque autre fonction de bourreau, ni la prison, ni les amendes pécuniaires. Il crut donc, qu’ayant eu assez de courage pour ne trahir pas sa religion en Portugal, il devait à beaucoup plus forte raison avoir la hardiesse de parler selon sa conscience parmi les juifs, dussent-ils l’excommunier ; car c’était tout ce que pouvaient faire des gens qui n’ont point de magistrature. Quia minimè decebat ut propter talem metum terga verteret ille qui pro libertate natale solum et utilitates alias contempserat et succumbere hominibus, prœsertìm Jurisdictionem non habentibus, in tali causâ nec pium nec virile erat ; decrevi potiùs omnia perferre et in sententiâ perdurare[5]. Mais il lui arriva ce qui arrive à presque tous ceux qui jugent des maux combinés. Ils s’imaginent que c’est dans l’union de deux ou trois peines que consiste l’infortune,