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VIE DE M. BAYLE.

critique, dans ses Pensées sur les comètes, et dans ses Réponses à un Provincial, où l’on défend la conformité de la foi avec la raison, contre sa réponse. Voici le jugement que M. Bayle fit de cet ouvrage, en écrivant à un de ses amis [1] : « Je vous dirai en confidence que l’ouvrage de M. Jaquelot est plein de malignité, de mauvaise foi et de faibles raisonnemens. Il abandonne, aussi-bien que moi, les notions communes de la bonté et de la sainteté ; et par conséquent il est percé de tous les coups que M. le Clerc me porte. Je n’oublierai pas de faire cette remarque, qui embarrassera le délateur ; car il est ami de M. Jaquelot, qui a fait passer par ses mains son manuscrit. » M. Bayle répondit à M. Jaquelot sous la forme d’entretiens, comme il avait fait à M. le Clerc : Entretiens de Maxime et de Thémiste : ou Réponse à l’Examen de la théologie de M. Bayle, par M. Jaquelot. M. Bayle remarque d’abord que dans la réplique de M. Jaquelot qui contient 472 pages, les 304 premières pouvaient être négligées, parce qu’elles ne regardaient point le fond de cette controverse. La dispute avait été réduite à ces trois points : 1°. à la liberté d’indifférence ; 2°. à l’origine du mal ; 3°. aux objections que le pyrrhonisme peut fonder sur quelques dogmes révélés. À l’égard du premier point, M. Bayle remarque qu’il n’est pas nécessaire de s’y arrêter. « M. Jaquelot, dit-il [2], aurait dû l’abandonner entièrement dans sa réplique, puisque M. Bayle lui avait donné la carte blanche, c’est-à-dire, qu’il lui avait permis de se montrer tout-à-fait pélagien, et puisqu’il l’avait combattu quant à l’origine du mal, sans supposer que le principe de la liberté d’indifférence. M. Jaquelot, ajoute-t-il, n’a pas laissé de remanier, comme une affaire capitale, la question, si l’homme possède cette liberté. La démangeaison de dogmatiser à l’arminienne l’a engagé à cela ; il a fait paraître la même impatience que les nouveaux prosélytes qui publient incessamment les motifs de leur conversion. »

M. Bayle reproche ensuite cinq fautes à M. Jaquelot. La première, c’est d’avoir attaqué la doctrine de M. Bayle sans faire semblant de savoir qu’elle est la même que celle des réformés, et puis d’avoir fait semblant de croire qu’elle en est très-différente. La seconde, c’est de croire que la même doctrine est innocente ou condamnable selon la diversité des intentions de ceux qui l’enseignent. M. Bayle avait fait voir que M. Jurieu avait enseigné, avant lui, qu’aucun système ne peut résoudre les objections qu’on peut faire touchant la chute d’Adam et ses suites, et qu’il avait exposé les mêmes difficultés que M. Bayle. On avait demande à M. Jaquelot, pourquoi il n’avait pas combattu plus tôt cette doctrine,

  1. Lettre à M. la Croze du 25 d’octobre 1706, pag. 1121.
  2. Entretiens de Maxime et de Thémiste, etc., pag. 4, 5.