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VIE DE M. BAYLE.

l’eût achevé [1]. L’impression en fut commencée au mois suivant [2], et le livre parut au mois d’août de l’année 1704, sous le titre de Continuation des Pensées diverses, écrites à un docteur de Sorbonne à l’occasion de la comète qui parut au mois de décembre 1680 ; ou réponse à plusieurs difficultés que M. *** a proposées à l’auteur [3]. Dans l’avertissement, M. Bayle dit que, quoiqu’il eût promis cet ouvrage diverses fois depuis six ans, il ne s’était pas pressé de le donner, pour plusieurs raisons qu’il allègue ; qu’ainsi, « lorsqu’il prit tout d’un coup la résolution d’y travailler, il se trouva sans préparatifs et obligé d’en ressusciter les idées, ou de les rappeler de fort loin, de sorte que les matériaux avaient été rassemblés et mis en œuvre en même temps. Il n’y a eu dans les Pensées diverses, ajoute-t-il, qu’une seule chose qui m’ait déterminé au dessein d’une apologie, c’est le parallèle de l’athéisme et du paganisme : mais, me voyant engagé par-là à prendre la plume pour ma justification, je crus que je devais aussi satisfaire à plusieurs difficultés qui m’avaient été proposées concernant d’autres endroits de l’ouvrage, et je me persuadai qu’il ne fallait se régler dans l’arrangement des réponses que sur celui des objections que l’on n’avait disposées que selon l’ordre de mes chapitres. J’ai suivi cette vue jusques à la fin du premier tome ; mais il a fallu l’abandonner dans le second, pour éviter l’engagement à faire un livre beaucoup plus gros que je ne m’étais proposé. Je n’ai donc mis dans le second tome que ce qui appartenait au parallèle du paganisme et de l’athéisme, et néanmoins je n’ai pu expédier toute cette affaire. Il me reste encore à discuter quelques objections sur ce sujet-là, que j’ai réservées pour un troisième volume [4]. »

M. Bayle fait ensuite une remarque qui lui paraît essentielle. « Je supplie le lecteur, dit-il, de se bien mettre dans l’esprit que cette longue dispute, où j’ai soutenu que le paganisme était pour le moins aussi mauvais que l’athéisme, est une chose tout-à-fait indifférente à la vraie religion. Les intérêts du christianisme sont tellement séparés de ceux de l’idolâtrie païenne, qu’il n’a rien à perdre ni à gagner soit qu’elle passe pour moins mauvaise ou pour plus mauvaise que l’irréligion. Cette dispute est donc du genre de ces problèmes où l’on peut prendre indifféremment tel parti qu’on veut, sans qu’il y aille de l’orthodoxie. Il a toujours été libre de soutenir ou que l’arianisme est pire que le sabellianisme, ou qu’il ne l’est pas ; que l’hérésie nestorienne est plus ou moins pernicieuse que l’eutychienne,

  1. Lettre à M. Des Maizeaux, du 9 de novembre 1703, p. 936.
  2. Voyez la lettre à M. Minutoli, du 16 de décembre 1703, p. 940.
  3. À Rotterdam, chez Reinier Leers, M DCC V, 2 vol. in-12.
  4. M. Bayle n’a pas donné ce troisième volume.