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VIE DE M. BAYLE.

que d’insister sur les moyens de montrer qu’on criait à tort ; que j’avais déjà fait savoir au public [1] les dispositions avec lesquelles je travaillais à corriger mon ouvrage, selon les avis que l’on voudrait bien me communiquer ; qu’en particulier je déclarais à la compagnie que je profiterais, avec toute sorte de docilité et de respect, des lumières dont elle voudrait me faire part ; en un mot, que si j’avais avancé des opinions hérétiques ou erronées (ce que je ne croyais pas), je les désavouais et les rétractais, comme je l’avais déjà déclaré dans un écrit imprimé depuis trois ou quatre mois [2].

 » Cette réponse ayant été trouvée trop générale, il fut dit qu’on me communiquerait les remarques que la compagnie avait faites sur mon Dictionnaire. Elles me furent communiquées quelques jours après par les commissaires qu’elle nomma ; elles se réduisaient entre autres à ces cinq chefs. I. Les citations, expressions, réflexions répandues dans l’ouvrage, capables de blesser les chastes oreilles. II. L’article de David. III. L’article des manichéens. IV. Celui des pyrrhoniens. V. Les louanges données à des gens qui ont nié ou l’existence ou la providence de Dieu. Je répondis deux choses comme la première fois : l’une, que je croyais avoir beaucoup de raisons à alléguer pour ma justification sur tous ces chefs ; l’autre, que nonobstant cela j’étais prêt à ôter du livre les pierres d’achoppement que l’on y trouvait ; j’ajoutai que, connaissant à cette heure, par les remarques de la compagnie, où étaient les griefs, je voyais plus clairement les manières de rectifier les choses, et qu’il me paraissait très-facile de remédier à tout, soit par des retranchemens ou des changemens d’expression, soit par des additions et des éclaircissemens. Qu’en particulier je voulais refondre de telle sorte l’article de David, qu’il n’y resterait plus rien qui pût offenser les âmes pieuses ; qu’à l’égard du dogme affreux des deux principes, c’est-à-dire du manichéisme, j’avais suffisamment déclaré combien il me paraissait absurde, monstrueux, contraire non-seulement à la religion et à la piété, mais aussi aux idées les plus distinctes de la raison et de la bonne philosophie ; que je m’étendrais davantage sur cela dans la seconde édition, et que si en qualité d’historien j’avais cru être obligé de rapporter exactement toute la force des objections des manichéens, j’avais cru, d’autre côté, que cela était sans conséquence, ou qu’il me semblait que je ne faisais qu’étendre ce que nos théologiens les plus orthodoxes disent tous les jours en peu de mots, c’est que l’accord de la sainteté et de la bonté de Dieu avec le péché et la misère de l’homme est un mystère incompréhensible que nous de-

  1. Dans les Réflexions sur un imprimé qui a pour titre, Jugement du Public, etc., § III, p. 2, col. 1.
  2. Réflexions sur un imprimé, etc., ibid.