et aux Cassius [* 1] de mon projet.
Tous ces vastes recueils me sont
devenus inutiles ; car j’ai appris
que ces matières ne plaisaient
qu’à très-peu de gens, et qu’on
laisserait moisir dans les magasins
du libraire un volume infolio,
qui roulerait presque tout
sur de tels sujets. On verra que
j’ai eu égard à ces avis : on ne
trouvera dans mes deux volumes
que peu d’articles de cette nature ; et
peut-être ne les y trouverait-on
pas s’ils n’eussent été
tout dressés avant que j’eusse
connu bien certainement le goût
des lecteurs.
Voilà l’une des raisons qui ont retardé la publication de cet ouvrage. Bien d’autres en ont causé le retardement. Je me fis d’abord une loi de ne rien dire de ce qui se trouve déjà dans les autres dictionnaires, ou d’éviter, pour le moins le plus qu’il serait possible, la répétition des faits qu’ils ont rapportés. Je me privais par-là de tous les matériaux les plus faciles à rassembler et à mettre en œuvre. Rien n’est plus commode pour les auteurs d’un dictionnaire historique, que de parler ou des papes, ou des empereurs, ou des rois, ou des cardinaux, ou des pères de l’église, ou des conciles, ou des hérétiques, ou des grands seigneurs, ou des villes, des provinces, etc. C’est donc un très-grand désavantage que de s’interdire ces matières-là, comme on le doit faire à tout moment, lorsqu’on se propose de faire les articles qui se lisent dans le Dictionnaire de Moréri. Si vous voulez donner les mêmes articles que l’on y trouve, il faut se borner aux choses qui y ont été omises. La peine de les séparer des autres, dans les originaux que vous consultez, n’est pas petite ; mais celle de les lier ensemble après les vides qui s’y rencontrent, lorsqu’on les a détachées de ce que Moréri rapporte, est beaucoup plus grande. Nonobstant toutes ces difficultés j’étais résolu à donner l’article de la plupart des personnes mentionnées dans la Bible ; mais j’appris qu’on ferait paraître bientôt à Lyon un dictionnaire tout particulier sur ces matières [1]. Le parti qui restait à prendre était le recueil de ce qui a été dit par les rabbins touchant ces personnes ; mais ayant su. » qu’on imprimait à Paris la Bibliothéque orientale de feu M. d’Herbelot, je cessai de travailler à de tels recueils [2]. Nonobstant les mêmes difficultés, j’eusse composé les articles qui se rapportent à l’histoire ecclésiastique, si je n’eusse considéré que M. du Pin donnait aux lecteurs de dictionnaires tout ce qu’ils pouvaient désirer. Son ouvrage
- ↑ * Ces articles sont, dans le Dictionnaire, à leur ordre alphabétique, ainsi que tous ceux qui, dans le Projet de 1692, étaient consacrés à des personnages. Les quatre morceaux sur le Livre de Junius Brutus, sur les Libelles diffamatoires, sur l’Hippomanes, sur le Jour, ainsi que la lettre à Durondel, mis par Bayle à la suite de son Dictionnaire, font partie du tom. XV.