humeur et de les convertir à leur mode afin de les gagner par leurs syllogismes et par leur dialectique ? Ce saint Thomas de l’école n’aurait-il point été choisi pour être l’apôtre de la nation des péripatéticiens, qui n’était pas encore bien assujettie et bien domptée ? nation présomptueuse et mutine ; qui défère si peu à l’autorité ; qui se fonde toujours en raison ; qui demande toujours pourquoi cela est ; qui est si impatiente de repos, si ennemie de la paix, si disposée aux choses nouvelles. Il me semble que cette dernière mission n’a pas été inutile, et il y a quelque apparence à ce que je dis. S’il n’y a pas un peu d’ironie dans ce discours, si tout y a été mis d’un air sérieux, c’est
Un beau rien renfermé dans de grandes paroles.
Tous les siècles ont demandé et
demanderont que l’on cherche
par d’autres routes que par celles
à la philosophie la connaissance
des vérités révélées. La philosophie
ne guérit point de l’esprit
flottant dont on doit être guéri,
si l’on veut que la prière nous
procure la véritable sapience.
Citons là-dessus un apôtre. Si
quelqu’un de vous manque de
sagesse, qu’il la demande à
Dieu qui donne à tous libéralement
sans reprocher ce qu’il
donne, et la sagesse lui sera
donnée. Mais qu’il la demande
avec foi sans aucun doute ; car
celui qui doute est semblable au
flot de la mer, qui est agité et emporté
çà et là par la violence du
vent. Il ne faut donc pas que celui-là
s’imagine qu’il obtiendra quelque
chose du Seigneur [1]. Jugez,
je vous prie, si les pyrrhoniens
qui sont toujours d’autant plus
dans leur élément que les efforts
qu’ils emploient à inventer des
raisons de douter de tout leur
ont réussi à trouver des objections
spécieuses contre la certitude,
sont des sujets susceptibles
de la grâce par la voie de la
dispute. Les missionnaires modernes
de l’Évangile les doivent
traiter comme auraient fait les
premier : ils les doivent avertir
de se défaire de tout esprit de
contestation, et d’en croire Dieu
sur sa parole, et en cas d’indocilité
ils doivent d’une façon spéciale
se souvenir de ce précepte
du grand saint Paul, et l’appliquer
à ces gens-là : Réprime les
folles questions et généalogies et
contentions et débats de la loi,
car elles sont inutiles et vaines.
Rejette l’homme hérétique après
la première et seconde admonition
[2]. Il ferait beau voir nos
thomistes et nos scotistes entreprendre
de convertir le nouveau
monde en soutenant des thèses
comme en Europe. Ils se rendraient
par-là de fort pauvres
convertisseurs. M. de Balzac n’y
songeait pas, ou il se moquait
gravement des scolastiques ; leurs
disputes publiques ne changent
personne, chacun se retire avec
les mêmes opinions qu’il y avait
apportées. Si l’on proposait aux
savans Chinois les explications
thomistiques de nos mystères,
et s’ils demandaient, Comment
croirons-nous ceci, puisque nous
n’en avons nulle idée ? on ferait