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DISSERTATION

monarchique de Rome ; et je ne pense pas qu’en lisant les livres des auteurs modernes qui s’appellent effectivement Brutus on soit assez simple pour les croire de la famille des anciens Brutus.

III. Hotman cru auteur du livre.

L’erreur de ceux qui attribuèrent l’ouvrage à François Hotman est plus petite de beaucoup que celles que l’on vient de remarquer [a]. Il y a encore aujourd’hui d’habiles gens qui le lui donnent. C’est ce que M. Constant [b], ministre et professeur célèbre à Lausanne [* 1], a fait dans son Abrégé de politique [c].

IV. L’auteur des Nouvelles de la République des Lettres censuré.

Celui qui a composé [* 2] les trois premières années des Nouvelles de la République des Lettres ayant dit une fois en passant [d] qu’on croit qu’Hotman s’est caché sous le nom de Junius Brutus, en donna [e] quelque temps après pour caution un livre imprimé à Paris en 1589, et intitulé : Traité de la Puissance des Rois contre le Roi de Navarre : mais s’il avait bien su son d’Aubigné, il aurait pu nous apprendre en même temps, et qu’Hotman avait passé pour l’auteur du livre de Junius Brutus, et que c’était sans raison. Nous allons voir ce qu’en a dit d’Aubigné. Commençons par écouter un auteur qui s’est montré fort curieux en ces sortes de recherches [f] : voici ses paroles. « M. Daillé m’a dit qu’il avait appris que l’auteur du livre intitulé Vindiciæ contra Tyrannos, sous le nom de Stéphanus Junius Brutus, est Hubert Languet, savant homme et grand politique. Ce qui m’a été depuis confirmé par M. Legoux de Dijon, qui ajouta que M. Delamare, conseiller de la même ville, avait remarqué cela faisant l’éloge d’Hubert Languet. D’autres attribuent ce livre à M. du Plessis, à qui je le donnerais aussi volontiers sur ce témoignage de d’Aubigné [* 3] : Il paraissait un autre livre que s’appelait Junius Brutus, ou Défense contre les Tyrans, fait par un des doctes gentilshommes du royaume, renommé pour plusieurs livres, et vivant encore aujourd’hui avec autorité. Dans un autre endroit de son Histoire [* 4] d’Aubigné dit que ce gentilhomme lui a avoué qu’il en était l’auteur. » On avait raison sur de tels passages d’attribuer le livre à M. du Plessis aussi volontiers qu’à Hubert Languet. Mais, si l’on avait connu la seconde édition de d’Aubigné, on n’eût plus été en balance : on aurait

  1. * David Constant, né en 1638, est mort en 1733. Fabricius, dans sa Bibl. latina, parle des notes de D. Constant sur les Traités de Cicéron des Offices et de l’Amitié.
  2. * C’est Bayle lui-même.
  3. (*) Tom. II, liv. II, chap. II, p. 108.
  4. (*) Tom. I, liv. II, ch. XV, p. 91.
  1. Voyez la remarque (H) de l’article Hotman, tom. VIII, pag. 279.
  2. Il est connu par plusieurs bons livres latins et français, et en dernier lieu par un système de morale en latin.
  3. À la p. 300 de l’édition de Francfort, 1687.
  4. Dans les Nouvelles de septembre 1684, art. VI, pag. m. 697.
  5. Voyez une lettre latine imprimée à la fin du Traité de Deckhérus, de Scriptis Adespotis, pag. 360, édit. Amst., 1686.
  6. Colomiés, dans ses Opuscules, pag. 130, edit. Ultrajecti, 1669 ; la première édition est de Paris, 1668.