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ZUÉRIUS.

le demanda pour un bel emploi au nom de la reine Christine [1]. ] L’historien de Boxhornius ne dit point en quelle année ce chancelier vint en Hollande : s’il avait pris la peine de la marquer, il eût évité une faute de chronologie : il n’eût point dit qu’un peu après le refus d’aller en Suède, Boxhornius refusa d’aller à Dort, où on l’appelait pour enseigner dans le collége que les magistrats rétablissaient l’an 1634. Non diù posthæc cum reip. Dordracenæ proceres illustre suum et vetustissimum à reformatione in fæderato Belgio gymnasium, anno quidem undè octogesimo superioris seculi erectum, sed collapsum restaurarent an. 1634 omnium calculis Boxhornius dignus judicatus et habitus est cui res litteraria in eo promovenda committeretur. Les temps sont là confondus, puisqu’il est certain que le chancelier de Suède ne vint en Hollande qu’en 1635. Les magistrats de Dort offrirent à Boxhornius une meilleure pension que celle qu’il avait à Leyde ; néanmoins il n’accepta pas leurs offres, ce qui lui procura à Leyde une augmentation de gages. C’est la suite ordinaire de ces sortes de refus, quand on sait ou quand on veut se faire valoir.

(D) Boxhornius préféra à tous ces honneurs l’état où il se trouvait dans son pays. ] Avant que son historien publiât ce fait, on l’avait pu lire dans Valère André : d’où vient donc que M. Moréri assure que Boxhornius passa en Suède, où son mérite lui fit avoir des charges considérables ? Est-ce ainsi qu’il fallait traduire ces paroles ? Evocatus superioribus annis à Suecorum ad ordines fæderatos legato, reginæ et procerum nomine ad amplissimas dignitates in Sueciam illi septentrioni amorem prætulit patriæ [2].

(E) Cette querelle avec Saumaise s’apaisa enfin. ] Entendons cela avec quelque distinction : les actes d’hostilité cessèrent, on renonça à la profession extérieure d’ennemi ; mais le cœur ne changea point, et ne fut pas capable de supprimer en toutes rencontres ses irruptions et ses sorties. Boxhornius, un an avant que de mourir, atteint déjà de la maladie dont il mourut, recevait dédaigneusement les visites des étrangers qui avaient été recommandés à Saumaise. Eos qui à Salmasio venerant fastidiosè excipiebat, jam tum nimio tabaci usu correptâ valetudine quæ altero post anno eum cum vitâ destituit. Voilà deux faits que l’on trouve dans les oraisons funèbres de Jean Caspard Lentzius [3]. Ce qui regarde le tabac me fait souvenir d’avoir ouï dire que Boxhornius avait un chapeau troué qui lui soutenait la pipe, et qu’ainsi il pouvait fumer en étudiant, et en composant.

(F) Il travailla sur plusieurs sortes de matières. ] Il fallait non-seulement qu’il fût très-laborieux, mais aussi qu’il sût beaucoup de choses, et qu’il eût beaucoup de facilité à composer ; car sans cela une vie aussi courte que la sienne n’aurait pas suffi à tous les ouvrages qu’il a publiés. J’ai déjà parlé de quelques-uns de ses commentaires sur les anciens auteurs, mais je n’ai point parlé de ses Notes sur Justin, sur Tacite, sur les Épîtres de Pline, ni de son Commentaire sur la Vie d’Agricola, publié l’an 1642, et défendu peu après contre les attaques d’un anonyme. Je n’ai point parlé des Annales de Zélande et de Hollande qu’il fit imprimer en flamand avec beaucoup d’additions, et en meilleur ordre ; celles de Zélande, l’an 1644, et celles de Hollande, l’an 1650. Il tâcha de se faire conférer le titre d’historiographe de Zélande [4], et puis celui d’historiographe de toutes les Provinces-Unies [5] : mais je crois qu’il n’obtint rien ; car si ses demandes avaient réussi, l’auteur de sa Vie en aurait touché quelque chose : or je n’ai point remarqué qu’il en dise mot. L’index de ses lettres marque qu’il obtint ce qu’il avait demandé à l’égard de la Zélande ; mais quand on consulte la page où l’on se voit renvoyé, on n’y trouve

  1. Ab Axelio Oxenstiernâ regni cancellario Fæderis Germanici directore, ad fæderatos Belgas legato extraordinario Reginæ et eorundem procerum nomine ad amplissimas dignitates in Zueciam evocatus fuit, Baselius, in Vitâ Boxhorniï.
  2. Valère André, Biblioth. Belg., page 641. Basélius ajoute : Quare eas recusavit, et apud suos mediocri in conditione esse maluit, quàm apud exteros alto in fastigio collocari.
  3. In Theatro Pauli Freheri, pag. 1180.
  4. Boxhorn., in Epistol., pag. 219, 226.
  5. Là même, page 308.