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SADUCÉENS.

sèrent point rejeter l’autorité de l’Écriture ; ils se contentèrent de rejeter les traditions. Ceux qui embrassèrent la secte de Sadoc furent appelés Saducéens[a]. Ils faisaient déjà beaucoup de figure au temps de Jonathas, frère de Juda Machabée, c’est-à-dire environ l’an 600 de Rome ; car Josèphe nous apprend qu’il y avait alors trois sectes parmi les Juifs, celle des pharisiens, celle des saducéens et celle des esséniens[b]. Il ajoute[c] que les saducéens rejetaient le dogme de la prédestination, et qu’ils enseignaient que l’homme est la seule cause de sa prospérité, ou de son adversité, selon qu’il use bien ou mal de son libre arbitre. Il dit ailleurs[d] que la secte des pharisiens et celle des saducéens s’entre-querellèrent beaucoup, et que les gens riches favorisèrent les saducéens, mais que les pharisiens eurent pour eux le menu peuple. Ceux-ci prescrivaient beaucoup d’observances comme venues de leurs ancêtres, et conservées de main en main, encore qu’elles n’eussent pas été couchées par écrit dans la loi de Moïse : les saducéens au contraire décréditaient tous les dogmes et tous les usages qui n’étaient point contenus dans l’Écriture. Nous apprenons, dans le même endroit de Josèphe, que le grand sacrificateur Hyrcan[e], qui avait été disciple des pharisiens, les abandonna et les maltraita, s’étant déclaré pour la secte des saducéens à l’instigation de son favori Jonathas, qui en faisait profession. On voit ailleurs, dans le même historien[f], que cette secte ne croyait pas que l’âme fût immortelle[g], ni que Dieu se mêlât du mal, soit pour le faire, soit pour y prendre garde (C). Il observe[h] que le nombre des saducéens n’était point grand, mais qu’ils possédaient pour l’ordinaire !es plus hautes dignités, ce qui n’empêchait pas que leur crédit ne fût médiocre : presque rien ne se faisait selon leur avis ; il fallait que ceux d’entr’eux qui exerçaient les magistratures se conformassent, malgré qu’ils en eussent, aux décisions des pharisiens, car sans cela ils n’eussent pas été tolérés par la populace. On peut, ce me semble, donner un grand jour à ceci par les deux observations qu’il a faites, l’une que les pharisiens n’usaient point de sévérité quand il s’agissait de punition[i], l’autre, que les saducéens étaient fort sévères dans les fonctions de judicature[j]. Enfin il dit[k] que la concorde ne régnait point parmi eux, qu’ils vivaient comme des bêtes farouches, et que les amis ne trouvaient pas moins de rudesse à leur conversation que s’ils avaient été étrangers. On a de la peine à voir quelque liaison entre cela et ce qu’il observe

  1. Maimon., ibid.
  2. Joseph. Antiquit. Judaïc. lib. XIII, cap. IX.
  3. Idem, ibid. et lib. II de Bello Judaïco, cap. XII (aliàs, cap. VII).
  4. Idem, Antiq. lib. XIII, cap. XVIII, sub fin.
  5. Il mourut vers l’an de Rome 649.
  6. Joseph. Antiq. lib. XVIII, cap. II.
  7. Idem, de Bello Judaïco, lib. II, cap. XII, (aliàs cap. VII).
  8. Idem, Antiq. lib. XVIII, cap. II.
  9. Idem, ibid. lib. XIII, cap. XVIII.
  10. Idem, ibid. lib. XX, cap. VII. Voyez la remarque (D).
  11. Joseph. de Bello Jud. lib. II, cap. XII (aliàs VII).