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PYRRHON.

nuations ecclésiastiques[1] avec plusieurs autres instructions sur les matières bénéficiales, dédiée à monsieur l’avocat général de Lamoignon, et à monsieur de Lamoignon de Basville, intendant de Languedoc. Il a encore eu part à l’édition des ouvrages de maître Antoine Mornac, imprimée en quatre volumes in-folio, chez Antoine de Sommaville, en l’année 1654, et aux deux dernières des Œuvres de maître Charles du Molin. Il a fait aussi quelques remarques sur le ivre de monsieur du Bois, avocat au parlement, intitulé : Maximes du Droit Canonique, qui ont été publiées avec ce livre plusieurs fois, chez Jean Guignard, en deux volumes in-12, en 1678, 1684, etc., par maître Denis Simon, conseiller au présidial et assesseur en la maréchaussée de Beauvais[2]. »

(B) Il fut bâtonnier de la communauté des avocats et des procureurs du parlement, en 1682.] En faveur de ceux qui pourront lire ceci sans avoir le dictionnaire de Furetière, je donnerai l’explication du mot bâtonnier. « Bâtonnier, en terme de palais, est un ancien avocat qu’on choisit tous les ans selon l’ordre du tableau, pour être maître de leur chapelle et de leur confrérie, et présider au siége qu’ils tiennent pour l’entretènement de la discipline du Palais et des règlemens. C’est à lui aussi qu’appartient la commission des charges des juges inférieurs pendant leur interdiction[3]. »

  1. Les Journalistes de Leipsic s’excusent sur une très-bonne raison de ne donner pas l’extrait de cette partie de l’ouvrage : quia, disent-ils, ibidem, pag.  574, nec res nec verba facilè intelligi possunt ab iis qui extrà Gallia vivant, et tabem illam fori ecclesiastici, litesque innumeras, ut et dissensiones ignorant quæ non solùm inter partes fervent, sed et sæpè inter parlamentum et tribunal regium.
  2. Tiré d’un Mémoire manuscrit.
  3. Dictionnaire de Furetière, au mot Bastonnier.

PYRRHON, philosophe grec, natif d’Élide au Péloponnèse, fut disciple d’Anaxarque, et l’accompagna jusques aux Indes[a]. Ce fut sans doute à la suite d’Alexandre-le-Grand, d’où l’on peut connaître en quel temps il a fleuri. Il avait exercé le métier de peintre[b] avant que de s’attacher à l’étude de la philosophie. Ses sentimens ne différaient guère des opinions d’Arcésilas (A) ; car il s’en fallait bien peu qu’aussi bien que lui il n’enseignât l’incompréhensibilité de toutes choses. Il trouvait partout et des raisons d’affirmer, et des raisons de nier : et c’est pour cela qu’il retenait son consentement après avoir bien examiné le pour et le contre, et qu’il réduisait tous ses arrêts à un non liquet, soit plus amplement enquis. Il cherchait donc toute sa vie la vérité ; mais il se ménageait toujours des ressources pour ne tomber pas d’accord qu’il l’eût trouvée. Quoiqu’il ne soit pas l’inventeur de cette méthode de philosophie, elle ne laisse pas de porter son nom : l’art de disputer sur toutes choses, sans prendre jamais d’autre parti que de suspendre son jugement, s’appelle le Pyrrhonisme : c’est son titre le plus commun. C’est avec raison qu’on le déteste dans les écoles de théologie (B), où il tâche de puiser de nouvelles forces qui ne sont que des chimères : mais il peut avoir ses usages pour obliger l’homme, par le sentiment de ses ténèbres, à implorer le secours d’en haut, et à se soumettre à l’autorité de la foi (C). Comme ce que je rapporte[c] d’une conférence où deux abbés disputèrent sur le pyrrhonisme, pourrait faire de la peine

  1. Diog. Laertinus, in Pyrrhone, lib.  IX, vol. n.61.
  2. id., ibid.
  3. Dans la rem. (B).