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PAULINA. PECKIUS.

là naissait la question d’où vient le mal. Ex primo sequitur, Deo si talis sit, convenire non tantùm bonum κατὰ δυνάμιν, sed etiam κατὰ ἐνέργειαν, nec tantùm ut bonus sit, sed etiam ut efficiat bonum : quia idea boni est. Idea autem boni, boni quoque causa est et exemplar. Porrò cùm ideam malli tollant platonici, quia, ut Parmenides dicebat, πᾶσα ἰδέα θεός ἐστι, sequitur ut quæratur, Undè mala proficiscantur[1]. Enfin, Heinsius observe qu’on a cru que cette question est très-importante à la piété, et il nous renvoie au Commentaire de Simplicius sur Épictète. Les paroles de ce commentateur m’ont paru si remarquables, que j’ai pensé qu’elles serviraient d’ornement à cet endroit de mon Dictionnaire. Les voici donc[2] : Περὶ τῆς ὑποστάσεως των κακῶν ὁ λόγος μὴ καλῶς διορθωθεὶς, καὶ τῆς περὶ τὸ θεῖον ἀσεβείας αἴτιος γέγονε, καὶ τῆς τῶν ἠθῶν εὐαγωγίας τὰς ἀρχὰς διετάραξε, καὶ πολλαῖς καὶ ἀλύτοις ἀπορίαις ἐνέβαλε τοὺς μὴ καλῶς αἰτιολογοῦντας αὐτήν. Εἴτε ἀρχήν τις λέγοι τὸ κακὸν, ὡς εἶναι δύο τῶν ὄντων ἀρχὰς τό, τε ἀγαθὸν, καὶ τὸ κακὸν, πολλὰ καὶ μεγάλα ἄτοπα συμβαίνει. Disputatio de naturâ atque ortu malorum, non benè explicata tùm impietatis ergà Deum causâ exstitit, tùm morum honestæque disciplinæ principia perturbavit : tùm multis, iisque inexplicabilibus dubitationibus involvit eos, qui causas illius non veras reddiderunt. Nam sivè quis malum à Deo conditum, sivè principium esse dicat, ut duo sint principia rerum bonum et malum : multæ magnæque absurditates sequuntur. Il touche là trois grands inconvéniens : car il assure que la fausse explication de l’origine du mal a été cause de l’impiété, et a confondu les principes de la doctrine des mœurs, et a jeté dans plusieurs doutes insolubles ceux qui ont mal raisonné sur cette matière. Il réfute avec une force et avec une solidité admirable, l’hypothèse des manichéens considérée en général : il la réfute encore mieux à l’égard des explications particulières dont ils se servaient. Mais quand son tour vient d’éclaircir et de prouver son hypothèse, il ne contente pas si pleinement son lecteur. Il se sert de la même méthode que les anciens pères, c’est-à-dire qu’il ne donne point d’autres causes de l’origine du mal, que le franc-arbitre de l’âme humaine. C’est le seul parti qu’il pouvait prendre ; il faut passer par-là nécessairement, après quoi l’on se trouve au milieu d’un carrefour, dont voici ce que disait un docte abbé à Paris, il n’y a pas fort long-temps. J’ai quatre chemins autour de moi, celui des calvinistes, celui des jansénistes, celui des thomistes, et celui des molinistes. Je sais bien celui qu’il ne faut pas prendre, mais non pas celui qu’il faut prendre. Quem fugiam habeo, quem sequar non habeo : la première route est contraire au concile de Trente, la seconde aux constitutions des papes, la troisième à la raison, et la quatrième à saint Paul. Les non-catholiques romains se peuvent tirer plus facilement de cet embarras, en préférant l’autorité de saint Paul à celles des papes et des conciles.

  1. Heinsius, Notis in Maxim. Tyrium, pag. 107.
  2. Simplicius, in hœc Enchiridii Epicteti verba, cap. XXXIV. Ὥσπερ σκοπὸς οὐ τίθεται πρὸς τὸ ἀποτυχεῖν, οὕτως οὐδὲ κακοῦ φύσις ἐκ κόσμῳ γίνεται. Quemadmodum aberrandi causa meta non ponitur : sic nec mali natura in mundo existit.

PAULINA (Lollia). Voyez la remarque[a] de l’article Lollius, tom. IX, page 341.

  1. La remarque (G).

PECKIUS (Pierre), né à Ziric-zée en Zélande, l’an 1529, fut reçu docteur en droit à Louvain, l’an 1553, et après y avoir été professeur royal des paratitles, il fut élu professeur en droit canonique, l’an 1562. La réputation qu’il s’acquit par ses leçons, et par ses ouvrages (A), fut cause qu’en 1586, on lui conféra la charge de conseiller au conseil suprême de Malines. Il y mourut le 16 de juillet 1589, et fut porté à Louvain pour être enterré dans l’église de Saint-Michel, où sa veuve et ses