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PATIN.

sur l’histoire de savans, et sur celle de leurs ouvrages ; car il avait une très-belle mémoire, beaucoup de lecture, et une excellente bibliothéque. Il n’eût pas débité des choses mal examinées, et selon qu’elles s’offraient à son imagination : en un mot, nous trouverions moins de faussetés dans son ouvrage, mais aussi nous n’y verrions pas au naturel son esprit et son génie ; nous n’y rencontrerions pas tant de faits curieux, ni tant de traits vifs et hardis, qui divertissent, et qui font faire de solides réflexions. On fit un choix parmi ses lettres qui fut publié à Genève, l’an 1683, et réimprimé bientôt en Hollande. Le débit encouragea un libraire de Genève à publier celles qui avaient été rebutées au premier triage : il les joignit avec les premières, et donna par ce moyen un recueil en trois volumes, l’an 1691.[* 1] Il fut contrefait en Hollande peu de temps après. Il eût mieux valu qu’on l’eût contrefait en Allemagne, parce que les libraires allemands ont la louable coutume de faire ajouter de bonnes tables aux livres qu’ils réimpriment, et jamais ouvrage n’en eut un plus grand besoin que celui-ci. On n’eut pas de peine à s’apercevoir que tout n’y est pas véritable : voici le jugement qu’en porta l’auteur des nouvelles de la république des Lettres. « Il est bon que les lecteurs soient avertis que tous les bons mots, ou tous les contes qu’il rapporte, ne sont point vrais. Il y en a où il paraît une effroyable malice, et une hardiesse prodigieuse à donner un tour criminel à toutes choses. On serait fort blâmable de croire ces endroits-là, sous prétexte qu’ils sont imprimés. Tout ce qu’on en peut recueillir, est que M. Patin les écrivait à son ami, comme une chose qu’il avait ouï dire à d’autres, et pour suivre la coutume, qu’il observait depuis long-temps, de s’entretenir avec lui par lettres, comme il aurait fait s’ils se fussent promenés ensemble. On sait bien que dans la conversation on parle tout aussitôt d’une chose qui court par la ville, sans qu’elle soit vraie, que d’une nouvelle qui est vraie. Et quand on a l’humeur satirique, comme il faut convenir que l’avait M. Patin, on relève plus soigneusement ce qui se débite au désavantage du prochain, que ce qui se dit à sa louange[4]. » M. Ménage en

    ges, telle que nous l’a donnée M. Mercklin, dans son Lindenius renovatus. Elle contient les Traités suivans. De Valetudine tuendâ, per vivendi normam, usumque legitimum rerum ad benè salubriterque vivendum necessararium. Extat pag. 341 Medici officiosi à Phil. Guiberto editi. Parisiis, apud Vid. Th. Pepinguè, 1649, in-8o. Notæ in Nicolai Ellain Tractatum de Peste. Ibidem, pag. 485. Notæ in Galeni librum de Sanguinis Missione. Ibidem, pag. 538. Quæstio de Sobrietate. Parisiis, 1647, in-4o., et Medici Officiosi, pag. 446. An totus homo naturâ sit Morbus. Ibidem, 1644, in-4o. Extat etiam cum DD. Virorum Epistolis et Responsis tùm medicis, tùm philosophicis. Roterodami, apud Rudolphum à Nuyssel, 1665, in-4o. Caspari Hoffmanni Apologiam pro Galeno edidit. Lugduni apud Laurentium Anisson, 1666, in-4o[1]. J’y ajouterai deux articles dont ce bibliothécaire ne fait aucune mention : savoir, les traductions latines de divers Traités d’André du Laurens, insérées dans l’édition latine des Œuvres de ce médecin, faite à Paris, en 1627, in-4o., par les soins de Guy Patin[2] ; et un Traité de Elephantiasi, dont il parle dans une de ses lettres à Charles Spon[3]. Le premier de tous ses ouvrages avait été imprimé séparément à Paris, en 1632, in-12, sous ce titre : Traité de la Conservation de la Santé par un bon régime et légitime usage des choses requises pour bien et sainement vivre. Je transcrirai ici le jugement que Patin lui-même en a porté. Je m’étonne bien, dit-il (9), qui vous a dit que j’étais l’auteur du petit Traité de la Conservation de la Santé, qui est derrière le médecin charitable. Cela ne mérite pas votre vue. Je l’ai fait autrefois à la prière du bon médecin charitable même, M. Guybert, qui m’avait donné le bonnet. Il me pria de le faire le plus populaire que je pourrais, afin de le pouvoir joindre à son livre. Il ne mérite pas que vous y mettiez votre temps… Si je puis jamais prendre quelque loisir, je tâcherai de raccommoder ce Traité, et de le rendre un peu meilleur qu’il n’est : et en attendant je vous prie de me faire la charité de ne dire à personne que je l’aie fait, car j’en ai honte moi-même. Rem. crit. [ Joly indique quelques opuscules de Patin omis dans cette remarque critique. ]

  1. (*) Le nouveau Ménagiana, tom. II, pag. 223, et tom. III, pag. 413 de l’édition de Paris, cite ces lettres d’une édition en cinq volumes pour le moins, de laquelle je n’avais jamais ouï parler, et dont les deux endroits cités ne se trouvent ni dans l’édition en trois volumes, 1691, ni dans la suivante, de 1692, en deux volumes. Ces deux-ci, au reste, ont aussi omis une lettre très-curieuse, concernant quelques fautes que Guy Patin avait trouvées dans l’Histoire du président de Thou. Cette lettre, en date du 4 février 1672, fait la CXXXVIIe. dans l’édition de Rotterdam, en un volume in-12, 1689. Rem. crit.
  1. Mercklini Lindenius renovatus, pag. 396.
  2. Voyez la remarque (B) de l’article Laurens, tom. IX, pag. 112.
  3. Lettres de Patin à Spon, tom. II, pag. 115.
  4. Nouvelles de le République des Lettres, avril 1684, art. I, pag. m. 115, 116.