remarqué beaucoup de défauts. Nous allons voir de quelle manière on parlait de quelques livres que Balzac devait donner au public ; elle était la plus propre du monde à les faire trouver mauvais, quelque bons qu’ils eussent pu être, car enfin ils auraient été infiniment au-dessous de la haute idée qu’on en donnait. Les amis et les ennemis d’un auteur ne sauraient lui rendre un plus mauvais office que d’annoncer ses ouvrages sous une notion si pompeuse. C’est étouffer un enfant à force ou sous prétexte de le caresser. « Il fera voir, si on lui donne du loisir et si on a de la patience, qu’il peut aussi bien réussir aux pièces amples qu’aux brèves, et qu’il a tellement en main les armes de l’éloquence qu’il se sert aussi dextrement de l’épée que du poignard. Ce sera lorsque paraîtront sur le théâtre dit monde, ce Prince, qui doit effacer la gloire de tous les autres en la même sorte que le soleil engloutit les étoiles à son lever ; cette solitude admirable, qui ôtera le lustre à la République de Platon ; ce Jugement redoutable, qui examinera tout l’univers et qui, à limitation du dernier, rendra à un chacun selon ses œuvres, et cette Histoire incomparable, où, comme dans un miroir enchanté, paraîtront les actions les plus cachées de la vie humaine, et qui servira de règle à la morale et à la politique, à quoi s’arrêtera comme à un principe invariable, toute la postérité [1]. » Cette même raillerie avait été débitée en d’autres termes : « Tout le monde s’attend avec beaucoup d’impatience de voir bientôt grossir les œuvres de l’auteur des Lettres de ce grand ouvrage dont il parle tant et depuis si long-temps ; et que là il déploiera les maîtresses voiles de son éloquence incomparable, et bandant tous les nerfs de son esprit qu’il découvrira tous les ressorts de sa doctrine, cette Solitude ou cet Ermitage, où il entrera plus de pièces qu’en la République de Platon ; ce Prince, travail inimitable dont le fragment, qui s’est fait voir comme un échantillon, a été déchiré en lambeaux par Phyllarque, fera voir si la principauté des beaux esprits lui demeurera, ou si la couronne lui durera aussi peu sur la tête qu’au roi de Bohême. Ce grand Jugement des Vivans et des Morts (si ce mot se peut dire sans blasphème et sans usurper l’office du fils de Dieu à qui le père a donné tout jugement), ce Jugement qui doit passer celui de Michel Ange et de l’Archange encore, s’il lui plaît ainsi, et balancer toutes les actions des hommes d’un si juste poids qu’il sera égal à celui du sanctuaire ; ce Jugement dernier du premier de tous les éloquens, qui doit censurer tout l’univers, et sans miséricorde faire le procès à des criminels que les parlemens adorent, c’est-à-dire aux rois et à la faveur, avec une bien plus ample liberté et un ton bien plus redoutable que celui des Lettres, où les papes, les rois, les cardinaux, les princes d’Italie et des autres nations, sont pincés jusques au vif ; sans doute cet effroyable Jugement où l’éloquence sera assise sur un trône de feu avec des foudres à la main, et son ministre couvert de lauriers comme un Alexandre, fera trembler les morts et les vivans, et passera les censures de l’Arétin, dont la langue et la plume ne pardonnèrent qu’à la divinité qu’il ne connaissait pas [2]. » Ce qui suit concerne le sieur de Javersac [3]. À ce dernier l’Acates de Phyllarque, écrivant à Palémon, semble avoir de telle sorte humé le vent, qu’il en ait perdu la parole, et lui avoir fermé la bouche sans lui donner un chapeau de pourpre [4]... Ce n’est pas qu’il n’ait fort bonne opinion de son esprit et beaucoup meilleure de sa valeur, qu’il dépeint dans son discours d’Aristarque (Ainsi se nomme-t-il) à Calidoxe, avec des couleurs qui ont de l’air de roman, encore qu’il assure que cette histoire n’est pas une fable. Mais en son premier discours, adressé à Nicandre, il faut avouer que, s’étant
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MUSAC.