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MAGIN.

giam aliorum nugis et inanibus ac superstitiosis auspiciis obtenebratam miris conatibus illustravit, et æmulis ae insciæ plebi cuncta cœlo subjici, à cœlo cuncta moveri liquidò demonstravit [1].

(B) ..... qu’il ne se trompa point sur son propre pronostic. ] Tomasini observe que Magin, ayant atteint son année soixante et unième, fut frappé d’une apoplexie qui l’envoya dans l’autre monde, et qu’il y avait longtemps qu’il avait dit à lui, Tomasini, et à d’autres, qu’il craignait cette année-là. Cet historien se réfute peu après, par l’épitaphe qu’il produit. Cette épitaphe témoigne que Magin vécut soixante et un ans, sept mois, vingt-huit jours et une heure. On n’a donc point dû alléguer, comme une marque de l’habileté astrologique de Magin, les malignités qu’il avait trouvées dans son horoscope par rapport à sa soixante et unième année, car il vécut près de huit mois au delà de cette terrible année. Son disciple Jean-Antoine Roffénus, professeur en philosophie, ménagea mieux l’honneur de son maître, car sans faire aucune mention de l’année soixante et unième, il se contenta de dire que Magin mourut sous un aspect de planètes qui, selon ses prédictions, lui devait être funeste. Infestis astrorum solis ad corpus Martis quos sibi prænoverat obtutibus concedens. Roffénus in epitaphio Magini. Obiit…… sole currente propè diametrum Martis, et circà exagonum Saturni[2]. Le sieur Jean Goad[3] n’a pas manqué de citer cette épitaphe, pour prouver, par un exemple de grand poids, la certitude de l’astrologie judiciaire. Roffénus, ajoute-t-il, connut aussi par son horoscope le temps de sa mort ; car pendant la maladie dont il mourut, il assura qu’il n’en échapperait pas, et que la figure de sa nativité et son année climatérique le condamnaient à cela. Sic enim genesimi suam et climactericum annum requirere. Ricciolus qui le rapporte le lui avait ouï dire.

(C) Je viens de trouver une lourde faute dans l’ouvrage d’un abbé de la confession d’Augsbourg. ] J’y trouve que Jean-Antoine Magin, premier professeur en mathématiques dans l’université de Bologne, mourut l’an 1690, et qu’il faut compter entre les services qu’il a rendus au public le soin qu’il eut en mourant de remettre entre les mains de César Marsille, son ami, quelques traités de Bonaventure Cavalleri, mathématicien très-célèbre, qui n’avaient pas été encore imprimés, ou qui n’étaient pas encore assez connus dans la république des lettres. Il lui en recommanda l’impression, et fut cause que, par ce moyen, son ami Marsille obtint la chaire de professeur. On cite le Journal de Leipsic, mois de décembre 1691, page 557[4]. Il n’y a point de faute dans la citation, mais on trouve tout autre chose dans cette page du journal : on y voit que Bonaventure Cavalléri, ayant appris que Jean-Antoine Magin était mort l’an 1629, se proposa de lui succéder dans la profession des mathématiques à Bologne, et que, pour cet effet, il donna à César Marsille, son ami, deux traités qu’il avait faits, l’un sur les sections coniques, l’autre sur la géométrie des indivisibles, Marsille les communiqua aux géomètres de l’académie de Bologne qui, les ayant admirés, en parlèrent aux sénateurs : ceux-ci agirent si bien en faveur de Cavalléri, qu’au mois de novembre 1629, il obtint la chaire qu’il souhaitait. Voilà ce que disent les journalistes de Leipsic, en donnant un Abrégé de la Vie de Cavalléri, mise au-devant de sa Sphera astronomica [5], par Urbano d’Aviso. Il est étonnant qu’on dise là que notre Magin mourut l’an 1629 ; car son épitaphe rapportée par le Tomasini[6] met sa mort au onzième de février, 1617. Il est encore plus étonnant que l’on ait si peu compris le latin de ces journalistes qui est le plus chair du monde. Et d’ailleurs, une telle chose

  1. Jacob. Philippus Tomasinus, in Elog. Virorum illustrium, pag. 283, 284.
  2. Tomasinus, ibid.
  3. In Astrometeorologiâ sanâ, pag. 129. Il est parlé de ce livre dans l’Histoire des Ouvrages les Savans, janvier 1691, pag. 204.
  4. Tiré d’un livre imprimé à Tubinge, l’an 1697, composé par Andreas Carolus, abbé de Saint-George au pays de Wirtemberg, et intitulé : Memorabilia ecclesiastica.
  5. À la seconde édition, qui est de Rome 1690, in-12, et posthume.
  6. Jac. Philipp. Tomasinus, Elog., part. I, pag. 287, 288.