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MONTMAUR.

primés concernant Montmaur. Il a eu la bonté de m’informer entre autres choses de celle-ci [1], que ce professeur était natif de la paroisse de Bétaille dans le bas Limousin [* 1]. Depuis cela j’ai lu un poëme de Balzac, qui témoigne que la province de Limousin était le pays natal de ce personnage.

Ne jactet nimis Auratum, cunasque Mureti :
Nobilis hunc quoque tam claris natalibus, asper
Eduxit pago Lemovix ; dein magna Tholosa
Civem habuit, propriumque tenet nunc maxima rerum,
Haud cedens dominæ formosa Lutetia Romæ [2].


Vous remarquerez en passant que les autres écrivains, qui ont fait satiriquement sa vie, envoient d’abord à Bordeaux, et ne parlent point de Toulouse ; mais Balzac l’envoie tout droit du Limousin à Toulouse, et puis à Paris.

(E) En 1617, il fut donné pour précepteur au fils aîné du maréchal de Praslin. ] L’abbé de Marolles observe que les trois fils du duc de Nevers n’avaient qu’un précepteur appelé G. G. de la ville d’Orléans, homme d’un petit génie, qui fut pourtant préféré à plusieurs, et entre autres à Pierre Montmaur, surnommé le Grec, qui alla prendre la place que celui-ci occupait auprès du fils aîné du maréchal de Praslin. Ce que dit M. Ménage, que par contre-vérité on le surnomma le Grec, n’est qu’une plaisanterie de satirique. Sed quod fidem omnem superat, græcè tunc nesciebat, GRÆCUS enim eâ tempestate per antiphrasim, quod minimè Græcus esset, ab invidis ac malevolis vocabatur [3].

(F) Je rapporterai une histoire... qui fera voir.... ses hâbleries, et la fausseté d’un conte.... contre lui. ] J’ai lu cette histoire dans un ouvrage qui n’est presque point connu hors du pays où il a été imprimé. Cela m’encourage à la donner toute entière. Il n’est pas besoin de la traduire, il suffira d’observer en faveur de ceux qui n’entendent pas le latin, que notre Montmaur, ayant dit à M. le chancelier que l’on trouvait certaines choses dans tels et dans tels auteurs, eut la confusion de ne pouvoir point avérer cela quand on mit ces livres sur table. Mommorius græcarum litterarum professor regius, solus sui ordinis eques, et apud urbis proceres inexhaustæ dictionis, eruditionis, ac memoriæ, ideòque gratus mensarum assecla, coràm illustrissimo cancellario, (is repentè me acciri jussum, et curru suo humaniter acceptum, in villulam amici, paulò ultrà suburbia, exspatiatum duxerat) multos authores laudavit, græcos et latinos, ad locum quemdam D. Pauli, ubi ad bestiarios et damnatos alluditur. Ego subdubitavi de fide laudantis, aliosque qui aderant, in meam sententiam adduxi, nonnisi consultis libris ei credendum. Postridiè, ubi diluxit, scripsi ad unum è familiaribus et domesticis ilustrissimi cancellarii, me animi causâ, domum vesperi reversum adiisse authores ab eo citatos, nil eorum quæ dixerat, reperiisse : non credideram fore, ut id resciret Dominus, aut porrò suâ curâ dignum duceret. Biduo pòst ad solitum prandium ivit Mommorius, multis jocis super mensam exagitatus est, tanquàm falsi suspectus, aut planè reus. Illicò homo miræ confidentiæ partes agere, velut in scenâ, cavillari, vociferari, vix exspectare dùm è mensâ surgeretur, appellare singulos et universos. Præsertim illustrissimam matronam, quæ ad latus viri erat, ut, quæ testis et conscia objectorum fuisset, suo de accusatore triumpho interesse vellet : et cedo, inquit, libros, Hesychium, Manilii astronomica, Strabonem, alios ; qui cùm sat citò reperiri non possent à novo nomenclatore, quamvis in refertissimâ bibliothecâ, mittitur confestim servus à pedibus meos postulatum, mox etiam currus, qui me adveheret. Adventu meo non parva expectatio omnium, quorsùm res evaderet, nam, tametsi hominis histrioniam satis intelligebant, ob ingentem tamen fiduciam. vel à me ipso vera dicere propè credebatur. Itum est in cubiculum supe-

  1. * C’est l’opinion adoptée par Sallengre ; mais dans le Barboniana imprimé dans le tome II des Mélanges de Bruys, on dit qu’il était de Guercy en Périgord ; et Joly ne manque pas d’opposer cela à l’opinion de Bayle. Goujet, dans son Mémoire sur le Collége royal de France, est de l’avis de Bayle.
  1. Qu’il avait apprise de M. Baluse.
  2. Balzac, à la page 162 du Barbon.
  3. Menagius, in Vitâ Gargilii Mamurræ, pag. 16.