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MILTON.

quelques-unes de ses lettres latines, et quelques harangues qu’il avait récitées en latin, lorsqu’il était écolier. Les lettres latines, qui furent imprimées l’an 1676 [a], et qui avaient été écrites par les usurpateurs de l’Angleterre, à diverses princes, sont de sa façon. Il aimait la poésie (G), et il y a plusieurs de ses poèmes, tant en latin qu’en anglais, qui ont vu le jour, soit pendant sa vie, soit après sa mort. Patin a débité beaucoup de mensonges (H).

Depuis la première édition de ce dictionnaire, on a publié à Londres [b], la vie de Jean Milton composée en anglais par M. Toland. J’en ai fait faire plusieurs extraits en latin, qui vont me fournir un assez long supplément de cet article. Milton était né gentilhomme (I), et fut élevé conformément à cet état [c]. Il eut une passion insatiable pour les lettres, de sorte que dès l’âge de douze ans, il s’accoutuma à veiller jusqu’à minuit, et que la faiblesse de sa vue, ni ses fréquens maux de tête ne furent point capables de retarder son inclination studieuse. Il fut envoyé à Cambridge à l’âge de quinze ans, et dès la même année il paraphrasa quelques psaumes en vers anglais. Il composa à dix-sept ans plusieurs pièces de poésies, les unes en sa langue maternelle, et les autres en latin, et toutes d’un caractere et d’une beauté fort au-dessus de son âge. Il reçut à Cambridge le dégré de maître ès arts, et s’en retourna chez son père. Ceux qui ont dit qu’il y retourna ayant été chassé de l’académie de Cambridge pour quelque forfait, ou rempli pour le moins de ressentiment de ce qu’il n’avait pu y obtenir nulle promotion, ont abusé malicieusement de quelques vers contenus dans une élégie latine qu’il adressa à son bon ami ami Charles Diodati. C’est sur le même fondement qu’on a débité qu’il passait son temps à Londres avec des filles de joie, et fort assidu à la comédie. Son voyage d’Italie lui procura l’amitié des plus beaux esprits et des plus illustres savans de ce pays-là [d]. Il apprit si bien la langue italienne, qu’il fut sur le point d’en composer une grammaire, et qu’il composa de fort bons vers italiens. Il avait le dessein de passer dans la Sicile et dans la Grèce ; mais ayant appris les commencemens des troubles de l’Angleterre il ne jugea pas à propos de s’occuper à des voyages divertissans, lorsque ses compatriotes portaient les armes pour le maintien de la liberté. Il s’en revint donc en son pays, et comme il passa par Genève, il y contracta des habitudes avec des gens de conséquence, qui lui firent savoir, dans la suite, les aventures

  1. On les a réimprimées à Leipsic, en 1690.
  2. L’an 1699, à la tête des œuvres de Jean Milton, in folio, et à part, in-8°.
  3. C’est ce qu’on n’a dit que signifient Les mots anglais de M. Toland, A Gentleman by his education and family. Mais comme Milton, qui devait connaître mieux que personne la qualité de sa famille, s’est contenté de dire, Defens. II. pag. m. 60, qu’il était né genere honesto, je ne sais si en anglais le mot Gentleman n’a pas une signification plus étendue qu’en français le mot gentilhomme,
  4. Comme Carlo Doti, Gaddi, Frescobaldi, Francini, Bonmattei, Coltellini, Climentelli, Jean-Baptiste Manso.