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MARTINI.

l’exemplaire du Pugio fidei, écrit de sa main en latin et en hébreu, soit à Naples dans le couvent de Saint-Dominique [a]. La grande connaissance qu’il a fait paraître des livres et des opinions des juifs, a fait croire qu’il avait été de leur religion [b]. Mais cela est faux.

  1. Possevin., in Appar. sacra.
  2. Augustin. Justiniani, præf. ad Porcheti Victoriam.

(A) Son Pugio fidei... fut imprimé a Paris, l’an 1651. ] Plusieurs personnes contribuèrent à cette édition. M. Bosquet, qui est mort évêque de Montpellier, tomba sur le manuscrit, lorsqu’il fouillait avec ardeur à Toulouse dans tous les coins de la bibliothéque du collége de Foix, environ l’an 1620 [* 1]. Il le lut, il en copia quelque chose ; et lorsqu’au bout de quelques anuées il apprit l’hébreu par les soins d’un docte Allemand, nommé Jacques Spieghel de Rosembach, il le montra à son maître de langue hébraïque, et le lui donna même à copier. Ce Jacques Spieghel, fort versé en ces matières, s’en étant entretenu plusieurs fois avec M. de Maussac, le fit penser à publier cet ouvrage, sur la copie nette et bien ponctuée qu’il lui en donna ; mais, quelque habile que fût M. de Maussac, il lui fallut un adjoint qui prit sur lui la principale partie du travail. Cet adjoint fut M. de Voisin, fils d’un conseiller au parlement de Bordeaux. Thomas Turc, général des dominicains, sollicita puissamment les promoteurs de l’édition, et ne se contenta pas de leur écrire des lettres également pressantes et obligeantes ; il donna ordre qu’ils eussent tous les manuscrits du Pugio fidei qui se purent recouvrer. Jean-Baptiste de Marinis, son successeur, continua de prendre les mêmes soins. Enfin l’ordre s’y intéressa tellement, qu’il fournit les frais de l’impression [1]. L’ouvrage sortit de dessous la presse l’an 1651, avec beaucoup de préfaces, et beaucoup d’approbations, qui font foi de tout ce que je viens de dire. M. de Voisin conféra le manuscrit du collége de Foix avec trois autres, dont le premier appartenait aux dominicains de Toulouse, le second avait été envoyé de Barcelone, et le troisième était venu de Majorque. Il a marqué à la marge les diverses leçons, il a fait des notes sur tous les endroits difficiles, il a mis en évidence tous les vols de Galatin, et il a fait de bons supplémens en forme de commentaire sur la préface de Raymond Martini. Il est surprenant que Gabriel Naudé n’ait point su que Scaliger se fût trompé en parlant de Galatin et de Sébonde. Voyez ci-dessous la remarque (C), et voici les paroles de Naudé : Omnium ut majori conatu, sic etiam feliciori eventu, Petrus Galatinus Monachus ex ordine sancti Francisci : aut potiùs Raimundus Sebondus professione medicus, cujus præter libros de theologiâ naturali, duo insuper volumina ingentia in collegio Fuxensi Tholosano etiamnùm hodiè sub titulo Pugionis fidei conservantur. Ex quibus, si Josepho Scaligero fides est habenda, omnia sua hausit et transcripsit Galatinus, dissimulato ipsiùs Sebondi nomine ; non tam propter acerrimum, quod semper extitit inter dominicanam familiam et franciscanam, odium, quemadmodùm malignè cavillatur Scaliger, et fortassis etiam imperitè ; quam ut eruditum istud opus accessione quâdam augeret et sibi vendicaret locupletatum ita atque expolitum [2]. On a fait une seconde édition du Pugio fidei, à Leipsic, l’an 1687, accompagnée d’une docte introduction in theologiam judaïcam [3].

(B) Il est... apparent que Galatin n’a pillé que... Porchet Salvago. ] C’est ce que prouve le père Morin : il assure qu’il a trouvé les mêmes choses dans Porchet et dans Galatin, partout où il les a confrontés. Il ajoute que toute l’adresse dont Galatin s’est servi pour couvrir

  1. * Confrontez ma note sur l’article Bosquet, tom. IV, pag. 8.
  1. Prodiit Pugio ille Parisiis apud Johannem Henault, anno 1651, in-folio, impensis ordinis, Altamura, Biblioth. ord. Præd., pag. 451.
  2. Naudæus, in Bibliographiâ politicâ, pag. m. 35.
  3. Composée par Josh. Benedictus Carpzovius, Theologiæ professor Lipsiæ.