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MAJUS.

quitta, pour s’appliquer entièrement à l’étude de la théologie. Mon édition de M. de Thou porte que Majoragius ne commença cette étude qu’après avoir employé treize ans à instruire la jeunesse. 3°. Il dit, dans le même M. Teissier, que Majoragius a vécu quarante-deux ans. L’édition latine ne lui en donne que quarante. La vérité est qu’il vécut quarante ans et près de six mois.

(H) Il doit être mis dans le catalogue des personnes accusées de plagiat. ] Natalis Comes assure qu’il a ouï dire à d’habiles Florentins, que Majoragius, redevable à Pierre Victorius de ses éclaircissemens sur la rhétorique d’Aristote, l’avait payé d’ingratitude, et s’était paré insolemment d’un bien dérobé [* 1]. Qui locus (Aristotelis in 3 libro rhetoricorum) cùm antè nostram ætatem legeretur depravatus, Petri Victorii patricii Florentini ac viri clarissimi ingenio est integritati restitutus : ut mihi, cùm essem Florentiæ, multis rationibus probârunt viri quidam eximiæ integritatis et eruditionis, atque in primis Vincentius Borghinus, vir omnium quos unquàm cognovi, multiplici rerum cognitione præstantissimus. Horum gravium testium autoritate commotus non potui non summoperè improbare M. Antonii cujusdam Majoragii nescio impudentiam ne appellem, an exquisitam ambitionem : qui omni explicatione propè Aristotelicæ artis ipsius Victorii scriplis accepta, ut ex iisdem viris illustribus cognovi, ex hâc emendatione elatus, mox alibi in Victorium ipsum non semel insultavit, et per hujus loci correctionem viros omnes clarissimos suæ ætatis insectatus est : atque in primis Hermolaum Barbarum virum præstantissimum [1].

  1. * Joly dit qu’un docte allemand a bien justifié Majoragio de cette accusation, d’autant plus ridicule que Majoragio cite avec éloge Victorius : qui dans une édition subséquente de ses Commentaires sur la Rhétorique d’Aristote, combattit quelques idées de Majoragio, et ne dit rien de relatif au prétendu plagiat.
  1. Natalis Comes, Mythol., lib. IX, cap. V, pag. m. 959.

MAJUS (Junianus), gentilhomme napolitain, enseigna les belles-lettres dans Naples vers la fin du XVe. siècle [a]. Il eut entre autres disciples le célèbre Sannazar (A). Il contribua beaucoup par ses leçons et par ses livres à rétablir le bel usage de la langue latine (B) ; mais il se distingua encore plus par l’explication des songes (C). Ce fut le plus grand onirocritique de son siècle ; et l’on recourait à lui de toutes parts, pour savoir ce que présageaient tels et tels songes. Plusieurs prétendaient que ses réponses leur avaient été fort utiles. Cela n’est pas indigne d’une réflexion (D).

  1. Voyez la Biblioteca Napoletana de Nicolo Toppi, pag. 168.

(A) Il eut entre autres disciples... Sannazar. ] Cela paraît par la VIe. élégie du Ile. livre de Sannazar, dédiée ad Junianum Majum præceptorem. J’en citerai ci-dessous un long passage.

(B) Il contribua beaucoup... à rétablir le bel usage de la langue latine. ] C’est la louange que Sabellic lui a donnée. Subjiciet his aliquis, dit-il [1], haud immerito Jo. Tortelium Aretinum et Junianum Parthenopæum. Juverunt illi industria uterque sua, nec multùm inter se diversa verborum utriusque linguæ copiam. Majus publia un livre à Naples, l’an 1475, de priscorum Proprietate verborum, qui fut réimprimé dans la même ville, l’an 1490. La seconde édition est pleine de fautes d’impression [2] ; mais il se loue beaucoup des imprimeurs de la première. Les paroles dont il se sert plairont aux curieux ; car elles apprennent le nom de celui qui commença d’exercer l’imprimerie dans ce pays-là. Accedit ad hæc quod Germani solerti, ac incredibili quodam invento nuper novam quandam imprimendi rationem invenerunt, præcipuè Matthias Moravus, vir summo ingenio summâque

  1. Sabellicus, de Linguæ Latinæ Reparatoribus, pag. 405, apud Anton. Nicodemum, Addizioni alla Biblioteca Napoletana, pag. 144.
  2. Nicolo Toppi, Bibliot. Napolet., p. 168.