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LINGELSHEIM.

qu’ils s’étaient écrites (B). J’ai dit ailleurs[a] qu’il fut le dépositaire du manuscrit de M. de Thou.

  1. Dans l’article de Camden, tom. IV, pag. 373, remarque (H).

(A) Il a passé pour l’auteur d’un livre... où Lipse est fort maltraité. ] Il en envoya des exemplaires à ses amis[1], et il leur demandait leur pensée, avec je ne sais quel empressement qui sentait l’auteur. On fut donc assez excusable de s’imaginer qu’il avait fait l’Idolum Hallense. Scaliger, ce grand critique, se fonda sur d’autres raisons : il crut trouver dans cet ouvrage le génie de Lingelsheim. Autor de Idolo Hallensi est Lingelsheim........ disait-il[2]. C’est lui qui m’en a envoyé un exemplaire... Je reconnais en de Idolo Hallensi les traits de l’esprit de Lingelsheim ; je le connais fort bien : il m’a envoyé le livre, et prié de lui en écrire mon jugement. Voilà de ses discours de conversation : sa plume les confirma dans une lettre qu’il écrivit à Lingelsheim touchant l’Idolum Hallense[3], où il lui attribua cet ouvrage, et lui en dit beaucoup de bien ; mais il sut ensuite que Dénaisius l’avait composé. Lingelshein, dit-il[4], m’a écrit que l’auteur de Idolo Hallensi est Denaisius assesseur de la chambre impériale ; et parce qu’il vit entre les jésuites il ne désire être nommé. M. Placcius a fort bien fait d’observer que le jugement de ce souverain critique n’était pas toujours bien sûr. Hâc sanè vice erravit, et infeliciter crisin suam quam ipsemet tantoperè prædicare solebat, exercuit heros ille criticorum hypercriticus[5]. Il cite Melchior Adam[6], qui a donné cet ouvrage à son véritable auteur, Pierre Dénaisius : il remarque que Colomiés ignorait la vérité sur cette affaire, ayant dit en deux endroits[7] que Lingelsheim était auteur de ce livre. Baudius conjectura comme Scaliger, et assura que la voix publique était conforme à sa conjecture : tant il est vrai que l’on est sujet à se tromper dans ces sortes d’attributions Viro gravi et sapienti Johanni Lingelshemio officiosam salutem nunciari cupio. Consentiens fama est eum esse auctorem libelli de Idolo Hallensi adversùs Lipsium, et id ipse conjeceram cùm primùm in manus meas venit. Non est quòd patrem pudeat suæ prolis, cùm non puduerit tantum virum tales nugas effutire in dedecus antepartæ famæ [8]. M. Teissier[9] a suivi la foule. Selon toutes les apparences, Lingelsheim apprit à Bongars que Dénaisius était l’auteur de cette Idole de Hall : voyez sa lettre CLVII. Ce livre, au reste, fut imprimé l’an 1605, in-4°., sous ce titre : Dissertatio de Idolo Hallensi Justi Lipsii mangonio et phaleris exornato atque producto. J’ai lu dans une lettre de Lingelsheim [10] que Goldast passa pour l’auteur de cet ouvrage, et que l’Amphitheatrum honoris le donnait à Scaliger. Une autre lettre de Lingelsheim nous apprend que Goldast avait eu soin de l’impression, et que cela lui fit beaucoup d’ennemis ; car ce livre irrita furieusement les jésuites. Quàm gaudeo probari tibi scriptum de Idolo, certè omnium bonorum cum magno applausu acceptus est, sed facetiæ illæ scholasticæ commoverunt nostros academicos, adeò ut rector distractionem libelli edicto inhibuerit, et jam vindictam spirant magistri, eo quòd nimis contumeliosus sit interpres in totum ordinem ; et quia Goldastum editorem hujus ludi ex typographo cognoverunt, et stilis et telis in illum insurgunt, atque etiam aulicos in partes trahunt, quos nimis rusticatim ille tetigerit[11]. Dans une autre lettre, il observe que le carme[12],

  1. Voyez Scaligérana, voce Lingelshemius, et les Lettres de Lingelsheim, pag. 194.
  2. Scaligérana, ibidem.
  3. Voyez ses Lettres, lib. IV, epistola CCCXV.
  4. Scaligérana, voce Denaisius.
  5. Placcius, de Anonymis, num. 51, p. 18.
  6. In Vitis Jurisconsult., pag. 447.
  7. Dans la Clef des Lettres, pag. 153 et 185 Opusculorum, edit. Ultraj., 1669.
  8. Baudius, epist. X, centur. II, p. m. 167.
  9. Additions aux Éloges, tom. II, p. 383
  10. Elle est dans le Recueil des Lettres écrites à Goldast, imprimé l’an 1688, pag. 167.
  11. Lingelsheim, epist. LVII 24 ad Bongarsium.
  12. Il s’appelait Anastasius Cochletius. Son livre est intitulé : Palæstra honoris D. Virginis Halensis pro Justo Lipsio, contrà Dissertationem mentiti Idoli Hallensis, 1607.