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HENRI IV.

sait que le massacre de la Saint-Barthélemi fut commis peu de jours après les noces de ce nouveau roi, et que ce prince, se voyant réduit à alternative de la mort ou de la messe, choisit le dernier parti. Les réponses que certains auteurs lui font faire sont des fantaisies de leur cerveau (M), et témoignent seulement l’envie qu’ils ont de mettre à profit leurs lectures. Il fut obligé de demeurer malgré lui à la cour de France quelques années. Il y sut très-bien dissimuler ses chagrins : il les chassa même, il les dissipa souvent par le secours de quelque galanterie, à quoi son tempérament et la corruption des dames prêtaient toutes sortes de facilités. La dame de Sauves, femme d’un secrétaire d’état, fut l’une de ses principales maîtresses [a]. Il ne s’amusa pas tellement à faire l’amour, qu’il n’entrât aussi quelquefois dans des intrigues d’état : il eut part à celles qui furent formées pour ôter le gouvernement à la reine-mère, et chasser les Guises de la cour [b]. Cette reine, ayant découvert ces pratiques [c], le fit arrêter, lui et le duc d’Alençon, et leur donna des gardes ; et voulut qu’ils fussent interrogés sur plusieurs cas très-atroces [d] (N). Ces deux princes furent mis en liberté par Henri III, au-devant duquel Catherine de Médicis les avait menés jusqu’au pont de Beauvoisin [e]. Le roi de Navarre s’évada enfin, l’an 1576, et se retira à Alençon [f]. Il rentra dans le parti huguenot et professa de nouveau sa première religion [g]. Les Rochellois le reçurent dans leur ville, et après qu’il y eut séjourné quelques mois, il alla prendre possession de son gouvernement de Guyenne [h]. Depuis ce temps-là, jusqu’en 1589, sa vie fut un mélange de combats et de négociations, et d’amourettes. Sa femme lui était un grand embarras, et ne laissa point quelquefois de lui être utile (O). Il y eut souvent des ruptures et des pacifications entre lui et la cour de France ; mais enfin Henri III se confédéra avec lui tout de bon et de bonne foi, pour résister à la ligue qui était plus furieuse que jamais depuis la mort du duc et du cardinal de Guise. La réconciliation et la conféderation de ces deux rois fut conclue au mois d’avril 1589 : leur entrevue se passa à Tours, le 30 du même mois, avec de grandes démonstrations d’un contentement réciproque. Ils joignirent leurs troupes quelque temps après pour faire le siége de Paris. Ils le firent en personne, et ils étaient sur le point de subjuguer cette grande ville, et de la châtier selon son mérite, lorsque le roi de France fut tué par Jacques Clément, au bourg de Saint-Cloud. Le roi de Navarre lui succéda, le 2 d’août 1589 ; mais ce ne fut qu’avec de très-grandes difficultés, et qu’en renonçant à la religion protestan-

  1. Là même, pag. 30.
  2. Là même, pag. 35.
  3. En 1574.
  4. Péréfixe, pag. 36.
  5. Là même, pag. 37 et 38.
  6. Là même, pag. 46.
  7. Là même, pag. 47.
  8. Là même, pag. 48.