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DUAREN.

ne bonum collegam[1]. Je laisse la suite de ce passage, où l’on avoue qu’enfin il s’excita une querelle entre ces deux professeurs, après que Baudouin se fut retiré. Je laisse aussi la contradiction que l’on rencontre dans le revers du feuillet : elle est bien grossière. Neque verò dubito quin si nunc Duarenus viveret Balduinum tam complecteretur à vobis nunc vexatum, quàm ab eo vestrarum partium suspecto fuit interdum abalienatus[2]. On venait de dire que pendant que Baudouin enseigna dans Bourges, il ne reçut de Duaren aucune marque d’inimitié, puis on avoue qu’il en reçut quelques-unes étant suspect de calvinisme. Ces soupçons ne peuvent pas concerner le temps qui suivit la sortie de Baudouin, car il alla à Genève en sortant de Bourges, et puis à Strasbourg, et il se déclara hautement de la religion[3]. Ils concernent donc son séjour à Bourges, pendant lequel, comme il l’avoue lui-même, il fut fort suspect de favoriser les protestans. Sa contradiction est donc claire et inexcusable[4]. L’un des passages que j’ai copiés nous fait connaître une faute de celui qui a fait l’éloge de Baudouin. Reversus Lutetiam (Balduinus), dit-il[5], magnâ jam quæsitâ famâ accersitur à Biturigibus ad docendi munus suscipiendum futurus collega Baronis et Duareni jurisconsultorum. Cela veut dire que l’université de Bourges appela Baudouin pour le faire collègue de Baron et de Duaren. Fausseté insigne ; car on l’appela pour une chaire que Duaren avait laissée. N’oublions pas que Baudouin fit des leçons dans cette université avant que d’y recevoir le doctorat. Cùm publicè juris civilis obscuriores titulos interpretatus fuisset, incredibili omnium studio doctor est renunciatus voce Baronis[6]. Or, il le reçut le 12 de mars 1549[7]. Il faut donc dire qu’il commença ses leçons dès l’année précédente ; car il enseigna le droit à Bourges pendant sept ans[8], il quitta cette académie l’an 1555. Il faut remarquer cela pour corriger une faute touchant le temps de la mort d’Éguinard Baron. Quelques-uns disent qu’il décéda l’an 1556[9]. Ils se trompent, car il ne vécut que trois ans depuis que Baudouin eut été fait son collègue. Si M. de Sponde a bien mis sa mort au 22 d’août 1550[10], nous avons un nouveau sujet de dire que Baudouin commença son professorat à Bourges, en 1548. S’il l’eût commencé au mois de janvier, on trouverait plus de deux ans et demi entre sa première leçon et la mort de Baron, et cela suffit pour pouvoir dire qu’ils furent collègues trois ans ; car dans ces sortes de livres on ne s’attache pas à la précision des calculs. Il est certain que Baron mourut le 22 de septembre 1550, âgé de cinquante cinq ans[11].

(F) Je rapporterai quelques autres faits, qui serviront de supplément au Moréri. ] François Duaren était fils de Jean Duaren, qui exerçait en Bretagne une charge de judicature. Il lui succéda en cet emploi, il en fit quelque temps toutes les fonctions. Jurisdictioni ante annos quindecim in Celticâ nostrâ Britanniâ non omninò infeliciter præfui, eoque magistratu in quo patri jam seni successeram vixdum adolescentiæ annos ingressus ita functus sum ut, etc.[12] Il faisait des leçons sur les Pandectes, dans Paris, l’an 1536, et entre autres disciples il avait les trois fils du savant Budé[13]. Il fut appelé à Bourges l’an 1538[14], pour y enseigner la

  1. Respons. ad Calv. et Bezam, folio 84.
  2. Ibid., folio 84 verso.
  3. Voyez son article, remarque (B).
  4. Illud verè dicere possum Balduinum in eâ urbe sæpè vestro nomine in periculum venisse dum vobis amicior esse credebatur, et erat fortasse quàm esse debebat, neque certè aliud habebant illi, quos laudas, inimici quod huic odiosè objectarent. Responsio, ad Calvinum et Bezam, folio 83 verso.
  5. Papyr. Masso, Elog. tom. II. pag. 257.
  6. Idem, ibid.
  7. Catherinot, Calvinisme de Berri, pag. 4.
  8. Balduin., Respons. ad Calvin. et Bezam, folio 86.
  9. Ménage, Remarques sur la Vie de Pierre Ayrault, pag. 157.
  10. Spondan., ad ann. 1550, num. 12.
  11. M. Pinsson des Riolles, que j’avais consulté, vient de me l’écrire.
  12. Franc. Duarenus, epist. ad Sebast. Albaspinæum, pag. m. 297, part. II Oper. Elle est datée du 24 de novembre 1550.
  13. Gulielm Budæus, epist. ad Jo. Duarenum. Elle est dans les Œuvres de Duaren, pag. m. 300, part. II.
  14. Annus jam agitur nonus ex quo in hanc civitatem juris docendi causâ publicè accitus sum. Duaren, præf. Disput. anniv., datée de Bourges en 1547.