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FERRARE.

vie n’en sont pas moins instructifs, et tout bien compté, je trouve étrange que Lindenius Renovatus[1] n’ait point parlé de l’auteur qui fait la matière de cet article. Ce n’est pas le seul péché d’omission qui s’y rencontre. Voyez la remarque (B) de l’article Vanderlinden, tome XIV.

  1. C’est ainsi que s’appelle la Bibliothéque de Scriptis Medicis, dans la dernière édition, qui est celle de 1686, in-4°.

FERRARE (Renée de France, duchesse de), célèbre par sa vertu, et par son attachement à église réformée, était fille de Louis XII et d’Anne de Bretagne (A). Elle naquit à Blois[a], le 25 d’octobre 1510[b], et fut accordée à Charles d’Autriche[c], l’an 1513 et l’an 1515, et depuis elle fut aussi promise à Joachim, marquis de Brandebourg ; mais elle épousa, en 1527 ; Hercule d’Est, IIe. du nom, duc de Ferrare et de Modène[d]. D’autres mettent le jour de ses noces au 28 de juin 1528[e]. Un historien moderne assure qu’elle possédait une vaste érudition (B). Il conte beaucoup de choses qui sont les unes très-fausses, les autres douteuses, touchant le voyage de Calvin à la cour de cette princesse (C). Ce qu’il débite sur les motifs qui la poussèrent dans la nouvelle religion, a fort peu de vraisemblance (D). Elle quitta l’Italie à cause de sa religion (E), dès que son mari fut mort, et s’en vint en France, où on lui permit la profession du huguenotisme. Elle fit sa résidence à Montargis, et y fournit un asile à plusieurs persécutés, jusques à ce qu’on la contraignit de ne le plus faire. Je doute que Mézerai en marque juste le temps (F). Ce fut avec beaucoup de regret qu’elle céda à cette dure nécessité : et si son courage parut en cette rencontre, sa charité ne se signala pas moins (G). Cette vertueuse dame avait toujours fait paraître une extrême inclination à répandre sa libéralité sur les misérables (H). Elle parla fortement pour le prince de Condé, lorsqu’on l’eut mis en prison (I) ; mais depuis elle se brouilla avec lui, parce que ni elle, ni ses ministres, n’approuvaient point la prise d’armes des protestans[f]. On ne saurait assez admirer la fermeté qu’elle opposa aux machines dont Henri II et son mari se servirent, pour la retirer de ce qu’ils nommaient hérésie (K). Elle mourut à Montargis, le 12 de juin 1575[g], dans la profession des réformés. C’est donc par une ignorance crasse qu’un jésuite[h] l’a placée dans le catalogue des personnes qui ont abjuré les erreurs des protestans. La plus petite marque de sa patience dans les disgrâces de ce monde ne fut point celle qu’elle donna par rapport aux galanteries de son mari. On prétend qu’après lui avoir donné trois fils et trois filles, elle se retira de son propre mouvement dans

  1. Le père Anselme, Hist. généalog., pag. 132.
  2. Voyez la remarq. (A).
  3. Qui fut ensuite l’empereur Charles-Quint.
  4. Anselme, Hist. généalog., pag. 132.
  5. Le père du Londel, Fastes des Rois, pag. 32.
  6. Voyez la remarque (G).
  7. Le Laboureur, Addit. à Castelnau, tom. I, pag. 749.
  8. Joannes Franciscus Hacki, in libro cui titulus Via regia, etc.