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FERNEL.

esset, ex consilio Fernelii sagaciter conjicientis exuperantem uteri ariditatem benigni sanguinis aspergine rigandam esse, vel etiam stomachum matricis naturaliter, perindè ac ex eventu in gravidis, arctissimum nonnisi mensium transitu reserari. Idque edoctus fuerat Fernelius ab Hippocrate [* 1]jubente mulierem ἱμεροῦσθαι τοῦ ἀνδρὸς inchoante menstruo profuvio, sed maximè eo desinente, verùm profluente adhuc potiùs quàm arefacto[1].

(L) .....Et qu’elle, l’en récompensa magnifiquement. ] Écoutons M. Patin[2]. « Quelques-uns parlent du roi d’Angleterre qui a épousé la princesse de Portugal : il la veut répudier à cause de sa stérilité, comme eût fait Henri II à sa femme Catherine de Médicis, si Fernel ne s’en fût heureusement mêlé, de laquelle par une insigne libéralité il recevait chaque fois qu’elle accouchait dix mille écus, à ce que dit Louis d’Orléans, en sa Plante humaine[3]. » Le comme de cet auteur est plus juste qu’il ne pensait ; car ce qu’il rapporte du dessein de Charles II, roi d’Angleterre, est une imagination des nouvellistes qui n’avait aucun fondement, et nous apprenons de Brantôme que Catherine de Médicis se fit tellement aimer du roi son beau-père et du roi Henri, son mari, que demeurant dix ans sans produire lignée, il y eut force personnes qui persuadèrent au roi et à M. le dauphin de la répudier, car il était besoin d’avoir lignée en France ; jamais ni l’un ni l’autre n’y voulurent consentir, tant ils l’aimoient[4]. Voyez citation (26) l’observation que j’ai faite sur le passage de Gabriel Naudé : elle montre que Louis d’Orléans parlait d’une chose dont il n’était pas bien instruit.

Voilà ce que je disais dans la première édition : j’y ajoute présentement deux correctifs : l’un est qu’il y a des livres qui font mention de ce dessein de Charles II ; l’autre est que Catherine de Médicis fut quelquefois dans de cruelles alarmes, d’où l’on pourrait conclure que son beau-père et son mari ne parurent pas toujours éloignés de la pensée du divorce[5]. Voyez la remarque (O) de l’article Marot, tome X.

(M) Nous rassemblerons.... les fautes de quelques auteurs. ] Celles de M. Moréri sont en petit nombre. Il dit que Fernel a vu que les livres qu’il avait donnés au public étaient les seuls qu’on expliquait dans les universités de médecine, et ceux qu’on y préférait à tous les autres. C’est un des plus grands mensonges qui ait paru dans un livre. Ce que Sainte-Marthe assure ne mérite qu’à grande peine d’être cru : jugez ce qu’on doit penser des hyperboles monstrueuses dont Moréri l’a couvert. Voici les paroles de Sainte-Marthe[6] : Cujus (Fernelii) admirabili genio id contigit, quòd à multis seculis nulli quamlibet erudito contigisse memini, ut ipso vivo atque vidente opera quæ de universâ medicinâ scripsit in scholis publicè legerentur : ejusque auctoritas veterum scriptorum instar apud optimum quemque rei medicæ magistrum gravissimi esset ponderis et momenti. Les fautes du sieur Bullart sont en plus grand nombre. Il dit que Fernel se résolut un peu tard à se mettre sous la discipline de Jacques Strebé pour apprendre les principes des sciences[7]. Cela signifie deux choses : l’une, que Fernel commença tard ses études ; l’autre, qu’il les commença sous Jacques Strebé. La première de ces deux choses est très-véritable, selon Plantius, dans la Vie de Fernel ; mais la seconde est très-fausse ; car Fernel avait déjà enseigné la philosophie dans le collége de Sainte Barbe, et reçu le bonnet de docteur en médecine, lorsqu’il lia commerce avec Strebé. Ce commerce consistait dans une instruction mutuelle ;

  1. (*) Lib. I de Morb. Mul.
  1. Antonius Menjotius, Dissertat. pathologicar., part. III, pag. m. 23.
  2. Patin, Lettre DXV, pag. 520 du IIIe. tome.
  3. Naudé, de Antiquitate Scholæ Medicæ Parisiensis, pag. 75, citant le même livre de Louis d’Orléans, dit que ce présent fut fait quatre fois. Fernelius ab Henrico secundo qui quater illi decem aureorum millia pro quatuor filiis ejus ope et consilio susceptis obtulit. Il est sûr que les dix enfans de Catherine de Médicis naquirent tous avant la mort de Fernel.
  4. Brantôme, Dames illustr., pag. 41.
  5. Voyez les Nouvelles de la République des Lettres, février 1700, pag. 196.
  6. In Elogiis, lib. I, pag. m. 32.
  7. Ballart., Académie des Scienc., tom II, pag. 83.