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DENYS.

M. Baillet, observe qu’il n’a jamais vu le Judicium de omnibus omnium gentium et temporum historicis, que l’on attribue à Dempster. Je crois qu’on rapporte mal le titre et qu’on n’a voulu parler que du jugement que Dempster a fait d’un-très grand nombre d’auteurs, et cela en très-peu de mots, à la tête de son Rosinus,

(G) Quelques-uns de ses livres furent condamnés par l’inquisition de Rome. ] Vous trouverez dans le décret du 16 de mars 1621, Thomæ Dempsteri de Antiquitate Romanorum, donec corrigatur ; et dans le décret du 17 de décembre 1623, Scotia illustrior, seu mendicabula repressa modestâ parecbasi Thomæ Dempsteri. M. Pope Blount assure [1] qu’on trouve dans ce dernier décret, liber inscriptus Hiberniæ sive antiquioris Scotiæ Vindiciæ adversùs immodestam parecbasim Thomæ Dempsteri. Cela ne se trouve point dans mon édition [2]. On voit dans la Bibliotheca Bibliothecarum du père Labbe[3], que l’auteur du livre qui a pour titre Hiberniæ, sive antiquioris Scotiæ Vindiciæ s’appelle G. F. Fédericus Hibernus, et que son livre fut imprimé à Anvers l’an 1621. in-8o.

  1. Censura Author., pag. 643.
  2. C’est celle de Genève, 1667, contrefaite sur celle de Rome de la même année.
  3. Pag. 198, edit. Rhotomag., 1678 : l’endroit est hors de sa place.

DENYS, tyran d’Héraclée, ville du Pont, profita de la décadence des Perses, après qu’ils eurent perdu contre Alexandre la bataille du Granique. Il n’avait osé s’agrandir pendant qu’il les avait redoutés : il ne les craignit plus quand il les vit engagés dans une guerre où la fortune se déclara pour les Macédoniens : mais il se trouva bientôt déchu des espérances qu’il avait fondées sur l’affaiblissement de la monarchie persanne. Il eut plus de sujet de redouter le vainqueur, qu’il n’en avait eu de craindre la cour de Perse. Ceux qui avaient été bannis d’Héraclée recoururent à la protection d’Alexandre, et le trouvèrent si favorable à leurs intérêts que peu s’en fallut que pour l’amour d’eux il ne détrônât Denys. La chose n’aurait pas manqué d’arriver, si Denys n’avait esquivé le coup par mille souplesses de politique (A), parmi lesquelles il faut compter son application à s’acquérir la bienveillance de Cléopâtre. Il se vit délivré d’inquiétude en apprenant la mort d’Alexandre. Cette nouvelle, à force d’être agréable, lui pensa faire tourner l’esprit (B). Perdiccas après la mort d’Alexandre n’eut pas moins de bonnes intentions pour les exilés d’Héraclée ; de sorte que Denys se vit obligé tout de nouveau à recourir à mille artifices, afin de conjurer la tempête qui le menaçait. Mais cet embarras fut de petite durée, parce que Perdiccas fut bientôt tué. Depuis ce temps-là les affaires de Denys allèrent toujours en prospérant, à quoi son mariage avec Amastris servit de beaucoup (C). La vie voluptueuse qu’il mena le fit devenir si gras, qu’il ne faisait presque que dormir ; et son assoupissement était si profond, qu’il n’y avait point d’autre moyen de l’éveiller que de lui ficher de longues aiguilles dans le corps : à peine pouvait-on en venir à bout par cette voie. Il mourut âgé de cinquante-cinq ans, dont il en avait régné trente. Ses sujets le regrettèrent beaucoup ; car il les avait traités doucement. Il laissa sa femme tutrice de ses enfans, et régente de l’état [a]. C’est elle qui fit bâ-

  1. Tiré de l’Histoire des Tyrans d’Héraclée, composée par Memnon. Les extraits