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DANTE.

re, quod ab Aristotelis præceptis longissimè aberraret[1]. L’Ugurgieri nous apprend que la comédie de Dante excita parmi les doctes et les virtuosi d’Italie une des plus mémorables guerres que l’on ait vues en ce genre-là[2]. Il ajoute que l’ouvrage de Mazzoni attisa ce feu, et que l’écrit qu’on vola à Bulgarini, et que le plagiaire fit imprimer sous son nom, fut la pierre de scandale. Bulgarini réclama son bien en publiant cet écrit, et en y mettant son nom : il fut réfuté par le plagiaire ; mais il revint à la charge, et se prévalut de la confession du vol. Sa réplique fut imprimée à Sienne, l’an 1588 : j’en rapporte le titre, afin de faire connaître le nom de ce plagiaire, qui n’a point encore paru dans les listes de cette sorte de voleurs. Il Bolgarino avvantaggiatosi nella causa per la confessione del furto rispose all’ avversario con un libro stampato per Luca Bonetti in Siena l’anno 1588, che fu intitolato : Difese in risposta dell’ Apologia e Palinodia di monsignor Alessandro Cariero Padovano in proposito della commedia di Dante[3]. Lilius Gyraldus parle d’un religieux augustin qui avait eu dès sa jeunesse une grande prévention pour Dante, et qui réfutait en toutes rencontres les critiques de ce poëte. Certè in eo (Danthe) poëticam dispositionem majoremque diligentiam plerosque desiderare video, ejusque linguæ nitorem : quos Joannes Stephanus eremita, et amicus carissimus, et municeps noster, quâ est eruditione, et quo à teneris erga Danthem fuit studio, mirabiliter solitus est refellere [4]. Je ne trouve point ce Jean Stéphanus dans l’Apparato de gli Huomini illustri della città di Ferrara, publié l’an 1620 par Agostino Superbi da Ferrara, teologo e predicatore de’ minori conventali. Gyraldus ajoute que les moines olivetains conservaient comme un trésor, la version latine en vers hexamètres, qu’un d’eux avait faite des poésies de Dante : Vidi qui latinum Danthem fecerat carmine hexametro, ex olivetanis videlicet sodalibus Pistoriensem quendam eorum temporum : quem librum (proh summe optime Deus, quantâ custodiâ asservatum in olivetano cœnobio ! ) ipsi non sine ambitione mihi, tanquam rem sacram aliquam, ostenderant [5].

(I)... Un autre livre... l’a fait passer pour héretique. ] C’est celui de Monarchiâ : il y soutient que l’autorité des empereurs ne doit point dépendre de celle des papes. Voilà son herésie[6] : Scripsit præter hæc opusculum de monarchiâ, ubi ejus fuit opinio quòd imperium ab ecclesiâ minimè dependeret. Cujus rei gratiâ tanquam hæreticus post ejus exitum damnatus est, cùm aliorum, tùm Bartoli jurisperiti sententiâ super lege i. c. præsules. lib. digestorum de inquirendis reis [7]. M. de Sponde, évêque français, se montre ici tout-à-fait ultramontain ; car il rapporte cette remarque de Volaterran sans y joindre nul correctif [8]. Il en use de la même manière en citant saint Antonin, qui a réfuté amplement, dit-il, l’erreur la plus capitale qu’il ait trouvée dans les écrits de ce poëte ; c’est d’avoir diminué le pouvoir des papes sur le temporel des rois. Quem (Danthem) egregias animi dotes ac scientiæ laudem et præclara scripta, tum aliis erroribus maculâsse observavit sanctus Antoninus [* 1] ; tum eo maxime, quo

  1. (*) Anton., tit. 21, cap. 5 ; § 2.
  1. Idem, ibid., pag. 73.
  2. Ugurgieri, nelle Pompe Sanesi, apud Lorenzo Crasso, Istoria de’ Poëti greci, pag. 85, 86.
  3. Idem, ibid., apud eundem Crasso, pag. 86.
  4. Lilius Gyrardus, Hist. poëtar., dial. V, sub fin., pag. m. 308.
  5. Idem, ibid.
  6. Raphael Volaterranus, lib. XXI, pag. 771.
  7. M. Moréri cite mal ici ; car il cite Bartoli, lib. I, de Iniquit reis. Ce sont trois fautes : 1°. On se croit renvoyé, non pas au jurisconsulte Barthole, mais au jésuite Bartoli. 2°. Il fallait citer lege i, et non pas libro i. La 3e. faute est de n’avoir pas dit inquir. reis, mais iniquit. reis [ Il faut de requirendis reis, comme ce titre est cité d’après Barthole même par Jean Névisau, l. i, n. 132 de sa Forêt nuptiale. C’est le titre 17 du 48e. livre du Digeste, ou il est conçu en ces termes : de requirendis, vel absentibus damnandis. De inquirendis reis est proprement le titre 40 du 9e. livre du Code. Rem. crit. ]
  8. Spondanus, ad ann. 1321, num. 7. Il cite le Ier. livre de l’Anthropologie de Volaterran. Cette citation, copiée par Moréri, ne vaut rien ; car cette Anthropologie n’est point divisée en livres particuliers : elle s’étend depuis le XIIIe. livre des Commentaires de l’auteur inclusivement, jusques au XXIVe. exclusivement. Ce que M. de Sponde allègue est un livre XXI.