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COMÉNIUS.

lement et spirituellement (L). Je ne dois pas omettre qu’il publia quelque chose contre les sociniens (M). L’auteur d’un livre intitulé, Janua Cœlorum reserata, a choisi ce titre, dit-on, à cause qu’il n’y en a point à quoi l’oreille soit plus accoutumée qu’à celui de Janua Linguarum reserata de Coménius (N). Les articles Drabicius et Kottérus contiendront diverses choses, qui pourront passer pour un supplément de celui-ci.

    t-il pas rendu la même justice au cardinal Colonna ? »

(A) Le livre qu’il publia... sous le titre de Janua linguarum reserta lui acquit une merveilleuse réputation. ] Quand Coménius n’aurait publié que ce livre-là, il se serait immortalisé. C’est un livre qui a été imprimé une infinité de fois, et traduit en je ne sais combien de langues : il y en a plusieurs éditions polyglottes. Je ne doute point que Coménius ne parle sincèrement, lorsqu’il avoue que le succès de cet ouvrage surpassa tout ce qu’il s’était imaginé ; car qui ne serait surpris qu’un tel livre ait été traduit non-seulement en douze langues européennes, mais aussi en arabe, en turc, en persan, et en mogol ? Le plus vain de tous les auteurs n’aurait jamais deviné cet événement. Factum est, quod futurum imaginari non poteram, ut puerile istud opusculum universali quodam eruditi orbis applausu fuerit exceptum. Testati sunt id permulti variarum gentium vit, tùm litteris ad me datis quibus inventioni novæ impensè gratulabantur, tùm translationibus in linguas vulgares quasi certatim susceptis. Non solùm enim in omnes Europæas linguas [1] (XII numero, quarum editiones publicas vidimus, nempè latinam, græcam, bohemicam, polonicam, germanicam, suedicam, belgicam, anglicam, gallicam, hispanicam, italicam, hungaricam) sed et in asiaticas, arabicam, turcicam, persicam, adeòque mogolicam, toti orientali Indiæ familiarem (ut ex litteris ad Jacobum Golium, Orientalium LL. Lugduni Vestræ professorem, à Petro Golio fratre, Alepo Syriæ anno 1641 datis patet) translatus esset idem libellus noster [2].

(B) Coménius fut délivré de la fatigue de régenter. ] Au lieu qu’auparavant ses travaux étaient consacrés au bien d’une seule classe, ils eurent pour leur objet le bien général de tous les collèges : c’est comme si un curé passait au cardinalat. Factis mihi, dit-il [3], à Mœcenate meo beato otiis, constitutâque honestâ (ut particulari scholæ ministrandi functione exemplus, communioribus possem vacare studiis) sustentatione, elaboravi sexennio.

(C) Il sortit de Lesna… lorsque les Polonais la brûlèrent. ] Nous verrons ci-dessous [4], qu’on a reproché à Coménius d’avoir été cause de ce désastre [5] ; et que, s’il avait pu suivre son inclination, il ne serait point demeuré dans cette ville, quoiqu’il conseillât aux autres de ne rien craindre, et qu’il les assurât que la délivrance viendrait bientôt.

(D) La pluie d’or, qui tomba sur lui à Amsterdam, l’obligea de s’y arrêter pour le reste de ses jours. ] Quelques-uns trouvèrent cela mauvais, attendu que sa charge de surintendant des églises de Pologne et de Bohème l’appelait ailleurs. Il y a quelque apparence que sa vie ambulatoire aurait duré plus long-temps qu’elle ne fit, s’il n’avait trouvé une ample moisson de biens à Amsterdam. Il y trouva des gens charitables, et des marchands riches qui espérèrent qu’il enseignerait le latin à leurs enfans par des voies courtes et

  1. Voici les noms de quelques-uns des traducteurs, ex Diario biographico Henn. Witte. L’allemande a été faite par Jean Mochingerus ; la polonaise, par Andre Wegierscius ; la Bohémienne, par Coménius ; la grecque, par Théodore Simonius ; l’anglaise, par Jean Ancoranus ; la française, par Samuel Hartlibius ; l’italienne et l’espagnole, par Nathanaël Duez ; la flamande, par Seidelius.
  2. Comenius, epist. dedicator. Operum didacticor., ad Consules Amsterd., pag. 1.
  3. Comen., epist. dedicator. Consulibus Amsterdam.
  4. Dans la remarque (K).
  5. Post Lesnæ incendium quod sua πολυπραγμοσύνῃ miseræ urbi concivit, ut etiam illi publicè exprobratum est. Maresius, in Antirrhetico, pag. 8.