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AUSONE

C’est s’abuser : le poëme où sont ces deux vers fut composé pendant la vie de l’empereur Valentinien[1]. Or, Ausone ne fut préfet du prétoire qu’après la mort de ce prince[2]. 5°. Il ne faut point croire ce que Scaliger assure, qu’Ausone, après son consulat, exerça la charge de proconsul d’Asie, et celle de vicaire du diocèse d’Afrique[3]. On trouve bien un Auxonius qui était vicaire du diocèse d’Asie l’an 365, et un autre Auxonius qui était proconsul d’Asie l’an 381[4] ; mais, que fait cela pour le sentiment de Scaliger ? 6.° Il prend l’oncle pour l’aïeul dans ces paroles : Hoc tanto viro nascitur Burdegalæ Decius Magnus Ausonius nomine avi materni, cognomine patris[5]. L’aïeul maternel d’Ausone s’appelait Cæcilius Argicius Arborius : il laissa un fils qui avait nom Æmilius Magnus Arborius. La faute de Scaliger est donc visible. 7°. Il dit qu’Hilaria et Julia Cataphronia, qui avaient fait vœu de virginité, étaient tantes maternelles d’Ausone [6]. Cela n’est vrai qu’à l’égard d’Æmilia Hilaria, car la religieuse Julia Cataphronia était sa tante paternelle [7].

(G) ... et les principales éditions d’Ausone. ] Gesner et ses abréviateurs assurent qu’Alde est le premier qui ait publié ce poëte. Ils ne marquent point en quelle année ; mais, s’ils entendent l’édition de Venise, en 1517, on les convaincra facilement de fausseté ; car, outre qu’Alde n’était point alors en vie, M. van Beughem assure qu’Ausone fut imprimé à Milan en 1490[8], et puis à Venise, l’an 1496, avec une préface de George Merula [9]. L’édition de Bâle, en 1523, chez Valentin Curion, est assez connue ; celle que Louis Mireüs fit faire à Lyon, chez Jean de Tournus, l’an 1557, est meilleure que les précédentes : les bibliographes en font mention ; mais je ne vois pas qu’ils parlent de celle que Ducheri procura, et à la louange de laquelle Nicolas Bourbon fit quatre vers que l’on voit au revers du titre de l’édition de Lyon, chez Sébastien Gryphius, en 1549. Je ne dis rien de l’édition de Plantin, en 1568, avec les notes de Théodore Pulman. Celle de Joseph Scaliger, à Lyon, chez Antoine Gryphius, en 1575, accompagnée d’un fort docte commentaire sous le titre d’Ausonianarum Lectionum, effaça les précédentes. Personne n’ignore qu’Elie Vinet est un des commentateurs qui ont le plus travaillé sur les ouvrages de notre poëte. Il régentait les belles-lettres à Bordeaux, et se voyait exhorté par plusieurs personnes de cette ville à procurer une édition de leur illustre compatriote : il tâcha de les satisfaire ; mais il ne trouva aucun manuscrit d’Ausone dans les bibliothéques de Bordeaux, et tout ce qu’il put faire fut de conférer ensemble les éditions. Il rétablit et il corrigea divers passages ; et, en attendant que les commentaires où il devait rendre raison de sa critique fussent prêts, il fit imprimer les Œuvres d’Ausone telles qu’il les avait corrigées. Jacques Goupil, son ami, eut soin de cette édition, qui est celle de Paris, en 1551. Vinet, quelques années après, recouvra un manuscrit qui avait été trouvé proche de Lyon, et qui lui donna beaucoup de lumières ; et, comme cela diminuait ses excuses auprès de ceux qui le pressaient de faire imprimer ses notes, il fit imprimer à Poitiers le poëme de claris Urbibus, accompagné de son commentaire, l’an 1565. Il envoya un exemplaire complet des Œuvres d’Ausone à Antoine Gryphius, qui le lui avait demandé, et qui promettait de l’imprimer promptement ; mais, cette édition ne paraissant pas, il fut exhorté de se servir de l’imprimerie qui avait été dressée à Bordeaux sur ces entrefaites. Il donna donc un autre exemplaire à Simon Millanges, qui commença de l’imprimer à Bordeaux, au mois de février 1575, et qui l’acheva au commencement de l’été de la même année. On reçut en ce temps-

  1. Cela est clair par le vers 450.
  2. Voyez Rubenius, in Vitâ Mallii Theodori, pag. 23.
  3. Scalig., in Vitâ Ausonii.
  4. Ruben., in Vitâ Mallii Theodori, pag. 24.
  5. Scalig., in Vitâ Ausonii.
  6. Idem, ibidem.
  7. Auson., in Parent., num. 26, pag. 140.
  8. Beughem, in Incunabul. Typographiæ, apud Joh. Albert. Fabricium, Biblioth. lat., pag. 177.
  9. Il y a un exemplaire de cette édition dans la bibliothéque de M. de Thou : elle est in-folio, et peut-être d’Alde.