marquer la bévue de Trithème : il a prétendu qu’Ausone fut évêque de Bordeaux (H).
(A) Il était fils d’un célèbre médecin. ] Qui s’appelait Julius Ausonius. Il était natif de Bazas, et fut s’établir à Bordeaux[1]. Sa femme avait nom Æmilia Æonia, et était fille de Cæcilius Argicius Arborius, qui s’était réfugié en Aquitaine, après une proscription qui l’avait dépouillé de tous les biens qu’il avait dans son pays [2]. Cet Arborius, s’étant fixé dans la ville Æquæ Tarbellorum[3], y épousa une honnête femme, qui n’avait guère de bien, et qui s’appelait Æmilia Corinthia Maura. De ce mariage sortirent un fils et trois filles. Le fils est le même Æmilius Magnus Arborius qui enseigna la rhétorique à Toulouse, et qui eut un soin tout particulier de l’éducation de notre poëte[4]. L’une des filles fut mariée à Julius Ausonius, et lui donna quatre enfans, dont le poëte Ausone était le second. Vous trouverez dans ses Parentalia, ou dans son Epicedion in Patrem les preuves de tout ceci, et de ce qui suit. Ce Julius Ausonius avait un très-grand mérite ; et, s’il était semblable au portrait que son fils en a laissé, c’était un reste du siècle d’or. Il y eut dans sa conduite la plus grande uniformité du monde. Il offrait gratuitement les soins de son art à tous ceux qui les demandaient : il travailla à remplir la bonne opinion qu’on avait de lui ; mais il ne jugea jamais favorablement de ce qu’il faisait :
Judicium de me studui præstare bonorum ;
Ipse mihi nunquam, judice me, placui[5].
Il eut de l’aversion pour les procès ;
il n’augmenta son bien ni ne le diminua ;
il ne fut jamais, ni témoin, ni
délateur, contre la vie de personne
[6] ; il fut sans envie et sans ambition ;
il mettait au même rang, de
jurer, ou de mentir ; il ne trempa
jamais dans nulle conjuration, dans
nul complot, dans nulle cabale ; il
observa religieusement les lois sacrées
de l’amitié ; il faisait consister le bonheur,
non à posséder ce qu’on voulait,
mais à ne souhaiter pas ce que
la fortune ne donnait point :
Felicem scivi, non qui, quod vellet, haberet :
Sed qui per fatum non data non cuperet[7].
Il ne cherchait point à pénétrer les
secrets d’autrui : il n’inventait point
de faux bruits contre la réputation de
son prochain ; et il gardait le silence,
quand il savait des vérités désavantageuses.
Non occursator, non garrulus, obvia cernens,
Valvis et velo condita non adii.
Famam, quæ posset vitam lacerare bonorum,
Non finxi : et veram si scierim, tacui[8].
Il ne crut jamais que n’avoir pas
fait de fautes fût une chose qui méritât
d’être louée ; c’est-à-dire, si je ne
me trompe, qu’il faisait une bonne
action parce qu’elle était bonne, et
non pas afin de se conformer aux lois.
Deliquisse nihil nunquàm laudem esse putavi,
Atque bonos mores legibus antetuli[9].
Il garda exactement la foi conjugale,
pendant les quarante-cinq ans qu’il
fut marié[10] ; et s’il eut la joie de
voir arriver ce qu’il souhaitait, ce ne
fut point par une trop grande indulgence
du destin, mais parce qu’il
avait donné des bornes étroites à ses
vœux :
Non quia fatorun nimia indulgentia, sed quòd
Tam moderata illi vota fuêre viro[11].
On le comparait aux anciens sages de
la Grèce, et il s’était rendu leur imitateur
par l’endroit le plus difficile,
ce fut de pratiquer ce qu’ils avaient
enseigné : il s’attacha beaucoup plus
à mener la vie d’un sage, qu’à discourir
comme un sage :
Quem sua contendit septem sapientibus ætas,
Quorum doctrinam moribus excolut :
- ↑ Auson., in Præfat. ad Siagr. et in Epiced. Parent.
- ↑ La province que l’on appelle aujourd’hui Bourgogne.
- ↑ Scaliger dit que c’est la ville d’Acqs, sur l’Adour.
- ↑ Auson., in Profess., cap. XVI, pag. 176.
- ↑ Auson., in Epiced., pag. 298.
- ↑ Indice me, nullus, sed neque teste, perit. Auson., in Epic., pag. 298,
- ↑ Idem, ibid., pag. 299.
- ↑ Idem, ibidem.
- ↑ Idem, ibidem.
- ↑ Idem, ibidem, pag. 300.
- ↑ Idem, in Parental., cap. I, pag. 110.