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ARTAXIAS III. ARTÉMIDORE.

na ordre à Tibère de l’installer. Artaxias fut tué par ses propres parens avant l’arrivée de Tibère.

(A) Il fut proclamé roi par les troupes de son père. ] Les continuateurs de Moréri font dire à Josephe ou à Tacite, que ce fut Marc Antoine qui mit sur le trône Artaxias : il n’y a rien de plus faux. Ils ajoutent qu’Artaxias ayant été défait fut envoyé en exil chez les Parthes. Autre bévue ; il s’y réfugia. Si Marc Antoine avait été en état de le bannir après sa victoire, il ne l’aurait pas envoyé chez les Parthes, il l’aurait mené à Alexandrie pieds et poings liés.

ARTAXIAS III, roi d’Arménie, était fils de Polémon, roi du Pont, et s’appelait Zénon. Il s’était tellement plu dès son enfance à imiter les coutumes des Arméniens, qu’il s’acquit par-là les bonnes grâces de la nation : de sorte que Germanicus ne crut point qu’il fallût jeter les yeux sur un autre, pour remplir la place de Vonones, que les Arméniens avaient chassé. Il alla donc à Artaxata, et en présence de tout le peuple il donna le diadème à ce Zénon, l’an de Rome 771. Tout à l’heure l’assemblée le proclama Artaxias, du nom de la ville capitale. Tacite, qui nous apprend toutes ces choses [a], parle de sa mort sous l’an 788 [b].

  1. Tacit., Annal., lib. II, cap. LVI.
  2. Id. ibid., lib. VI, cap. XXXI.

ARTÉMIDORE, celui qui a écrit sur les songes, était d’Éphèse ; néanmoins il s’est donné le surnom de Daldianus dans ce livre-là, afin de faire honneur à la patrie de sa mère (A). Il s’était surnommé Éphésien dans d’autres livres. Il vivait sous Antonin Pius, comme il nous l’apprend lui-même, quand il dit qu’il a connu un athlète qui, ayant songé qu’il avait perdu la vue, remporta le prix de la course dans les jeux que cet empereur fit célébrer [a]. Jamais auteur n’a plus travaillé pour un sujet raisonnable, qu’Artémidore a travaillé pour un sujet très-indigne d’un homme de jugement (B). Il ne se contenta pas d’acheter tout ce qui avait été écrit sur l’explication des songes, ce qui montait à plusieurs volumes (C) : il employa de plus beaucoup d’années à voyager, afin de faire des connaissances avec les diseurs de bonne aventure. Il eut un grand commerce avec eux dans les villes et dans les assemblées de la Grèce, dans l’Italie, et dans les îles les plus peuplées ; et il ramassa partout les vieux songes, et l’événement qu’on disait qu’ils avaient eu [b]. Il méprisa les médisances de ces gens graves et à sourcil froncé, qui traitent d’escrocs, d’imposteurs et de joueurs de gobelet, ceux qui se mêlent de prédire (D) ; et, sans avoir égard à ce que les Catons en diraient, il pratiqua plusieurs années ces devins. En un mot, il consacra tout son temps, et toutes ses veilles, à courir après des songes ; et il croyait que ce grand travail lui avait fourni de quoi payer de raison et d’expérience (E). Il eut grand soin d’instruire son fils aux

  1. Artemid., lib. I, cap. XXVIII. Voyez aussi le chap. LXVI du même livre.
  2. Artemid., præf., pag. 3. Voyez aussi liv. V, pag. 252.