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ARRIAGA.

a été réimprime plusieurs fois. L’édition de Lyon, en 1669, est augmentée. Le Ier. et le Ie. volumes de son Cours de Théologie furent imprimés en 1643 ; le IIIe. et le IVe., l’an 1644 ; le Ve., l’an 1649 ; le VIe., l’an 1650 ; le VIIe. et le VIIIe., l’an 1655. Ce sont tous des in folio, imprimés chez Balthasar Moret, à Anvers [1]. Il travaillait au IXe. tome, lorsqu’il mourut : c’était celui de Jure et Justitiâ [2]. Don Nicolas Antonio a donné à Arriaga un livre de Oratore, imprimé à Cologne, l’an 1637, et Brevis Expositio Litteræ Magistri Sententiarum, cum Quæstionibus quæ circa eam moveri possunt, et auctoribus qui de illis disputant, imprimé à Lyon, l’an 1636, in-8o., après d’autres éditions [3] ; mais comme le père Sotuel ne parle pas de ces deux ouvrages, quoique le premier eût été donné à ce jésuite par Alegambe, il y a lieu de croire que don Nicolas Antonio s’est trompé [* 1].

(B) On prétend que... il est devenu le fauteur du pyrrhonisme. ] C’est le sentiment de M. de Villemandy : Sunt alii, dit-il [4], qui periculosiùs adhuc sollicitant (sacratiora fidei dogmata) cujus modi Arriaga suis in Thomam Disputationibus theologicis ; nihil enim non moliuntur, ut aliorum quorumcumque placita reflexionibus et objectionibus suis destruant, ipsi autem nihil ferè adstruunt..…. Celebris est inter romanenses scholasticos Rodericus ille Arriaga..…….. Is multis volum. fol. et philosophiam et theologiam est persecutus ; jàm autem singula quæque sic tractat, ut aliorum ferè omnium opiniones variis rationibus infirmare studeat, suas autem levissimè suffulciat. Si ex hâc methodo ingenii conditio dijudicetur, verè pyrrhonius potest haberi ; cùm tamen placita sua, quantùm potest firmet, iisque constanter inhæreat, non potest legitimè eo nomine donari [5]. On peut assurer que, si la lecture des écrits de ce jésuite inspire le caractère pyrrhonien, c’est par accident et contre son intention ; car il est aussi décisif qu’un autre et aussi ardent à confirmer ses décisions ; mais, ou par la faiblesse de l’esprit humain, ou par la difficulté des matières, il s’est trouvé dans le cas d’une infinité d’auteurs qui découvrent admirablement le faible d’une doctrine, et qui n’en peuvent jamais rencontrer le fort. Ils ressemblent à des guerriers qui mettent à feu et à sang le pays de l’ennemi, sans pouvoir mettre leurs frontières en état de résistance. M. Ancillon trouvait ce jésuite assez singulier en sa manière d’écrire, et plus libre que les autres qui, par une indigne servitude, n’osent abandonner les sentimens des écrivains de la société, et qui les suivent avec scrupule comme infaillibles... Rapportant l’opinion de Vasquez, il dit nettement que, tout bien compté, il ne se fie pas beaucoup à la solution du père Vasquez [6]. J’ai remarqué, ajoute M. Ancillon, en lisant Arriaga et Oviédo, que toujours, lors qu’un de ces deux Jésuites soutient l’affirmative d’une proposition, l’autre soutient la négative ; ce qui est assez rare, même parmi les docteurs de la religion romaine en général, et que je n’ai guère vu qu’en Cornélius à Lapide et en Estius. Il n’est point rare, que sur une infinité de questions, tant de la philosophie, que de la théologie scolastique, les Jésuites s’entre-réfutent les uns les autres. On peut même dire que cela est très-commun. Suarez et Vasquez en sont un exemple.

(C) Il a réfuté avec application toutes les subtilités des scolastiques, pour montrer que deux propositions contradictoires sont quelquefois véritables, et quelquefois fausses. ] Il a très-bien démêlé tous ces sophismes. Voyez sa IIe. Dispute sur les Summu-

  1. * L’ouvrage intitulé Brevis Expositio, etc., Cologne, 1635, est, dit Joly, du père Jean Martinez de Ripalda. Quant au Traité de Oratore, il a été imprimé avec le nom de l’auteur, et la permission du provincial de la société des jésuites en Bohême. Le libraire déclare en outre, dans son avant-propos, le tenir d’Arriaga. Ces trois circonstances paraissent à Gibert (Jugemens sur les Savans qui ont traité de la Rhétorique.) pouvoir au moins balancer l’opinion de Bayle.
  1. Nicolas Antonio, Biblioth. Hispan., tom. II, pag. 109, marque que plusieurs de ces volumes furent imprimés aussi à Lyon.
  2. Tiré de Sotuel, Biblioth. Script. Soc. Jesu, pag. 729.
  3. Nicol. Antonio, Biblioth. Script. Hispan., tom. II, pag. 209.
  4. Petrus de Villemandy, in Scepticismo debellato, cap. II, pag. 13.
  5. Idem, ibid., cap. IV, pag. 32.
  6. Voyez le Mélange critique de Littérature, tom. I, pag. 208.