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ARISTOTE.

marques de zèle pour la religion, que l’on n’ait données pour le péripatétisme. Paul de Foix, célèbre par ses ambassades et par son érudition, ne voulut pas voir à Ferrare François Patrice, parce qu’il apprit que ce savant homme enseignait une autre philosophie que la péripatéticienne[a]. C’était pratiquer envers les ennemis d’Aristote ce que les zélateurs veulent qu’on fasse à l’égard des hérétiques. Après tout, il ne faut pas s’étonner que le péripatétisme, tel qu’on l’enseigne depuis plusieurs siècles, trouve tant de protecteurs (X), et qu’on en croie les intérêts inséparables de ceux de la théologie[b] ; car il accoutume l’esprit à acquiescer sans évidence. Cette réunion d’intérêt doit être aux péripatéticiens un gage de l’immortalité de leur secte, et aux nouveaux philosophes un sujet de diminuer leurs espérances ; joint qu’il y a des doctrines d’Aristote que les modernes ont rejetées, et qu’il faudra enfin adopter[c]. Les théologiens protestans ont bien changé de maxime, s’il est vrai que les premiers réformateurs aient autant crié que l’on dit contre le péripatétisme (Y). Le genre de mort qui peut à certains égards faire plus d’honneur à la mémoire d’Aristote, est de dire que le chagrin de n’avoir pu découvrir la cause du flux et du reflux de l’Euripe lui causa la maladie dont il mourut (Z). Quelques-uns disent que s’étant réfugié dans l’île d’Eubœe, à cause d’un procès d’irréligion qu’on lui faisait à Athènes il s’empoisonna[d]. Mais il n’avait que faire de sortir de cette ville, pour se délivrer de la persécution par cette voie. Hésychius assure, non-seulement qu’il y eut arrêt de mort contre lui, à cause d’un hymne qu’il avait fait en l’honneur de son beau-père, mais aussi, qu’il avala de l’aconit en exécution de l’arrêt[e]. Si la chose était véritable, elle serait rapportée par plus d’auteurs. Voyez les remarques (G) et (Z).

Le nombre des écrivains anciens et modernes qui ont travaillé sur Aristote, soit pour le commenter, soit pour le traduire, est infini. On en trouve une liste, mais qui n’est pas complète, dans quelques-unes des éditions de toutes les œuvres[f]. Voyez aussi un traité du père Labbe, qui a pour titre, Aristotelis et Platonis græcorum interpretum typis hactenùs editorum brevis Conspectus, et qui fut imprimé à Paris, l’an 1657, in-4°. M. Teissier nomme quatre auteurs qui ont composé la vie d’Aristote, savoir : Ammonius, Guarin de Vérone, Jean‑Jacques Beurerus, et Léonard Arétin[g]. Il a oublié Jérôme Gemusæus, médecin et profes-

  1. Thuanus, de Vitâ suâ, lib. I.
  2. Voyez la remarque (I).
  3. Telle est l’hypothèse des intelligences motrices ; car la doctrine des tourbillons sans quelques lois générales, et sans quelque direction particulière à chaque planète, ne peut contenter l’esprit.
  4. Eumelus, apud. D. Laërtium, lib. V, num. 6.
  5. Hesychius, in Vitâ Aristot.
  6. Dans celle de Genève en 1605, et dans celle de Paris en 1629, procurée par Guillaume du Val, et qui est la meilleure de toutes.
  7. Tessier, Catal. Aut. Bibliothec., etc. pag. 367.