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ANABAPTISTES.

mus.... minùs voluimus imputatos illis qui intra Waterlandorum dictas Confessiones, bonâ fide, procul fallaciis Mennoniticis, hærere sese profitentur. Absit ut cuiquam invito et deprecanti Hæresim impingamus ! Sed nec isti aliorum apologiam suscipiant, aut alios esse ac fuisse negent, quos hic Elenchus, sub generali enthusiastarum et anabaptistarum nomine, ne nesciat juventus nostra, coarguit. Factum tamen novissimè, ut diximus modò, à Rypensi scriptore Epistolæ in modum belgico sermone mihi opponendæ. Qui errores hic complures notatos dùm à suis Waterlandis amolitur, si modò verè et sincerè, hoc ipso non se aut suos in talibus Controversiis peti, sed familias alias ex dicto grege, intellexisse debuit. Frustrà ergò est omnis ipsius expostulatio, quasi ignorem quid Rypenses Anabaptistæ sentiant, aut quasi lectoribus meis imponam [1]. Hoornbeek a eu l’équité de n’imputer point à cette secte les hérésies de quelques particuliers : Hìc quidem imprimìs à communibus illorum et singularibus cœtuum dogmatis secernenda sunt propria aliqua doctorum ipsorum[2]. Il en marque deux nommément : celle de Jacques Outreman, et celle de Weke Walles. Le premier admet trois essences dans la Divinité, et veut que l’essence du Père soit renfermée dans le ciel, et ne passe point cette borne. L’autre enseigne que Judas était un homme de bien, et qu’il a été sauvé ; qu’il n’a point commis de crime en trahissant Jésus-Christ ; et que les prêtres et les scribes n’en ont point commis non plus en persécutant jusqu’à la mort notre Seigneur ; et que l’un et l’autre des deux brigands ont été sauvés. Outreman enseignait à Haerlem en 1605. Wailes enseignait dans le territoire de Groningue l’an 1637 ; et il était si zélé pour ses sentimens, qu’il excommuniait sans miséricorde tous ceux qui ne les approuvaient pas. On le chassa de la province ; et comme il se retira en Frise, le synode protestant qui fut tenu à Franeker l’an 1644, fit en sorte qu’on le chassât[3].

(E) Elle a souffert une infinité de subdivisions. ] Je craindrais de fatiguer mes lecteurs si je rapportais ici le catalogue de toutes les sectes de l’anabaptisme : je me contenterai donc d’indiquer un livre où l’on pourra se satisfaire si l’on est curieux de voir cette liste. Voyez-la préface des Annales Anabaptistiques de Jean Henri Ottius.

(F) Elle se vante d’un grand nombre de martyrs. ] Si elle n’avait à produire que ceux qu’on a fait mourir pour des attentats contre le gouvernement, elle se rendrait ridicule par son gros martyrologe ; mais il est sûr que plusieurs anabaptistes qui ont souffert constamment la mort pour leurs opinions ne songeaient point à se soulever. Citons un témoignage qui ne puisse pas être suspect. C’est celui d’un écrivain qui a réfuté de toute sa force cette secte[4]. Il remarque que trois choses ont été cause qu’elle a fait tant de progrès. La première est que ses docteurs étourdissaient par un grand nombre de passages de l’Écriture ceux qui leur prêtaient l’oreille ; la seconde, qu’ils affectaient un grand extérieur de sainteté ; la troisième, que ces sectaires témoignaient beaucoup de constance à souffrir et à mourir. Il prouve qu’aucune de ces trois choses n’est une marque d’orthodoxie. Voici ce qu’il dit sur la dernière : La troisième marque par laquelle les anabaptistes séduisent les simples et inconstans, est leur constance à souffrir et à mourir. Mais cela est bien trop simple et trop froid pour faire que leur doctrine d’Antechrist soit bonne et saine : comme dit sainct Cyprian, la peine ne fait pas le martyr, mais la cause. L’Escriture [* 1] tesmoigne que ceux-là sont vrais martyrs et bienheureux, qui souffrent pour justice, pour la vérité, et pour le nom de Christ. Pour laquelle vérité les anabaptistes ne souffrent pas, qui est une chose à desplorer, mais pour une doctrine d’Antechrist. Et certes les princes et des rois ne tiennent pas bon ordre pour extirper cette secte ; ils font mourir ces povres gens simples, la plus part estans séduicts. Ils devroyent plustost

  1. (*) Matth. V, 11 ; I Pier. IV, 20 ; I Jean IV, 3.
  1. Fridericus Spanhemius F. filius, in Elencho Controversiarum, p. 87, édit. an. 1694.
  2. Hoornbeek, Summa Controvers., pag. 189.
  3. Idem., ibid., pag. 389, 390.
  4. Guy de Bres, épître dédictatoire de la Racine, Source et Fondement des Anabaptistes. Ce livre fut imprimé l’an 1565.