Qui d’Apollon saintement inspiré
T’es le premier du peuple retiré
Loing du chemin tracé par l’ignorance,
Scève divin, dont l’heureuse naissance
N’a moins encor son Rosne décoré
Que du Thuscan le fleuve est honoré
Du tronc qui prend à son bord accroissance :
Reçoy le vœu, qu’un dévot Angevin
Enamouré de ton esprit divin,
Laissant la France, à ta grandeur dédie.
Ainsi toujours de Rosne impétueux,
Ainsi la Saône au sein non fluctueux
Sonne toujours et Scève et sa Délie. (ii, 143)
chapitre neuvième
LES DERNIÈRES ANNÉES DE MAURICE SCÈVE.
Le chapitre précédent a dit l’influence que Maurice Scève a exercée sur le développement de la poésie lyrique en France, sans tenir compte de la littérature locale. Il va sans dire que l’ascendant de l’auteur de la Délie dans sa patrie est plus impérieux que partout ailleurs ; les poètes lyonnais du seizième siècle ne s’abstiendront jamais d’imiter les vers de leur illustre concitoyen.
Ainsi les Œuvres de Louise Labé[1], qui sont sans doute le recueil de poésie lyrique le plus célèbre sorti de Lyon dans ces années, nous rappellent plutôt le style de Scève que celui des auteurs de la Pléiade. Les sonnets, surtout, contiennent souvent les mêmes images et idées que les dizains de la Délie, et le choix des mots et des constructions trahit également l’influence de la langue poétique de Scève. Quelques contemporains ne crurent même pas à l’authenticité du Débat de Folie et d’Amour et supposèrent une collaboration de la belle Cordière avec Maurice Scève[2]. En tout cas, cette œuvre est écrite dans le goût du chef de l’école lyonnaise qui aimait tant à réfléchir sur la nature de