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alors de vingt-deux ans, et qui s’est montré dans tous ses ouvrages poétiques grand admirateur de Maurice Scève. Je ne doute pas qu’ils ne se soient connus personnellement. Des Autels était le cousin de Pontus de Tyard qui habitait Mâcon à ce moment. On sait que les promoteurs de la Renaissance dans cette ville se réunissaient souvent à ceux de Lyon ; les agréments d’une navigation sur la Saône les y invitaient, et le futur évêque de Chalon-sur-Saône était l’ami de Maurice Scève et de Louise Labé[1]. Des Autels était sûrement de la compagnie ; la publication de ses ouvrages devait le conduire souvent à Lyon. Je ne peux pas juger de son premier ouvrage le Moys de May[2] que je n’ai pas vu ; son Repos de plus grand travail de 1550 contient deux pièces adressées à Maurice Scève[3]. Elles sont parfaitement conformes à l’esprit et à la forme de ses autres vers qui, à cette époque, ne sont souvent qu’une imitation assez servile de la Délie.

Des Autels publie encore dans la même année 1550[4] la Réplique aux furieuses défenses de Louis Meigret (avec la suite du Repos de l’auteur). Comme ce livre était aussi une apologie de la langue française qui commence à laisser ses plumes folles et devenir drue pour s’envoler par l’Univers avecques la Grecque et Latine, l’auteur ne pouvait pas passer sous silence la Deffence et Illustration de Du Bellay. Il ne cache nullement sa sympathie pour cet ouvrage dont il partage la plupart des idées,

  1. Abel Jeandet. Pontus de Tyard. Paris, Aubry 1860. — Étienne Tabouret, un autre Maconnais, cite dans ses Bigarrures et Touches (Paris 1582) un rébus par chiffres, inventé, à ce qu’il dit, par M. Scève. Il est trop indécent pour être rapporté ici.
  2. Sans lieu ni date, Brunet admet Lyon, Ollivier Arnoullet 1544. La date est peu probable, puisque Des Autels n’avait que 16 ans à cette époque.
  3. A M. Scève.
    Le mesme Dieu qui te blessa
    Et naistre en toy fait haulte invention,
    De mesme trait mon ame transperça ;
    Pour ce je chante à mesme intention.
    Le danger mesme à mon affection
    Est qui rendit la tienne tant confuse :
    Et la loy mesme avecques toy j’accuse
    Qui de monstrer deffend si bien qu’on m’aime :
    Mais je n’ai pas mesme art, ny mesme Muse
    Pour déclarer mon feu ardent de mesme.
    A M, Scève.
    Du beau Phébus la clarté admirable
    Nous rend ça-bas alègres et joyeux,
    Quand la beauté de sa face amiable
    Ouvertement se descouvre à nos yeux :
    Mais lors qu’il est seulement veu des Cieux
    A nous caché par les obscures nues.
    Nous est-il pas d’autant moins gracieux
    Que ses vertus nous sont plus incongnues ?
  4. L’épître liminaire est datée du 20 août 1550.