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Et elle planta en terre sa lance qui, tout de suite, commença à fleurir et à se changer en olivier, voulant donner à entendre que la force et puissance de sa majesté fera telle crainte à ses ennemis que leur malveillance se convertira en paix.

Dans la grande rue de Saint-Jean, près du palais archiépiscopal, on avait érigé un simulacre très compliqué représentant la Fortune, entourée d’un „théâtre“ avec des figures allégoriques qu’il serait trop long de décrire. À Porte-Froc, on passa au-dessous d’un nouvel arc de triomphe — le cinquième déjà. Ce fut là que le Cardinal de Ferrare, alors archevêque de Lyon, se présenta au roi avec tous les insignes de sa dignité et suivi de tous ses fonctionnaires. Ces ecclésiastiques fournirent au roi un nouveau poêle et le conduisirent à la Cathédrale de Saint-Jean, où on lui présenta l’eau bénite.

Après les rites religieux, le roi entra dans le Palais de l’Archevêché devant lequel on avait érigé une colonne de victoire de cinquante-six pieds de haut, que terminait un globe dont les continents étaient en or, la mer en azur, et sur lequel se tenait une statue de la Victoire. Le palais lui-même était orné avec tout le luxe qu’un Italien issu d’une des familles les plus illustres de la Renaissance pût imaginer.

Par une autre porte on sortit sur la Saône où il y avait un pont avec toute sorte de vaisseaux construits expressément pour le service du roi et de la cour. On fit sur le fleuve toute sorte de joutes, combats et naumachies avec d’autres passe-temps et accompagnement de musique. Parmi les vaisseaux destinés au roi, il y avait un bucentaure, le navire le plus grand et le plus admirable qu’on eût jamais vu sur la Saône. On avait construit sur le pont une salle à manger, garnie de tout le luxe imaginable. Le roi, fatigué d’étonnement et d’admiration, s’y reposa, finissant ainsi la première journée de cette fête splendide.

La reine fit son entrée le lendemain, en l’ordre, joie et jubilation de l’entrée du roi. Le troisième jour, les conseillers de la ville firent leur révérence à leurs Majestés, en leur offrant les présents qu’on avait commandés aux plus habiles orfèvres de Lyon. Puis, le roi et la reine dînèrent sur les navires préparés dans ce but et regardèrent les joutes nautiques de ceux de Saint-Vincent et de Saint-George, et les plongeons des vaincus. Ils allèrent voir ensuite les navires construits pour la naumachie nocturne, et ils se promenèrent sur la Saône aux sons des trompettes, clairons, tambourins et fifres, et au tonnerre de l’artillerie du château et des galères.

Le quatrième jour était destiné au repos. Le matin le roi alla voir le grand jeu de paume qu’on avait bâti pour son usage ;